
Saison 6, Episode 12
Première partie
Écrit par Phil Atcliffe
Édité par Peace Everett
Version française de
Episode 12 : Labyrinth
Traduction Chantal Martineau

"Je veux que vous soyez présent à mon mariage"
"Vous êtes folle ?"
Quoi ?
"Vous pensez sérieusement que je vais venir et vous voir épouser *Lex Luthor ?* Je n'ai pas plus envie d'assister au mariage de cet homme que de… monter dans l'une de ses voitures ! Et *vous* devriez faire la même chose. Cet homme est le diable, un gangster, un voleur, un assassin et en plus un -- mégalomane."
"Mon Dieu, vous le haïssez à ce point ?"
"Je ne sais pas si je le hais ou non, Lois. Mais je sais que Luthor est l'individu sur Terre que je suis le plus *proche* de haïr. Rien ne l'intéresse à part lui-même et il est totalement immoral. Souvenez-vous de cela, la première fois que vous vous disputerez avec lui, vous pourrez peut-être gagner au départ, comme vous l'avez toujours fait avec moi, mais il ne s'arrêtera pas avant de vous avoir brisée."
"Je suppose que vous me haïssez aussi."
"Vous haïr, non. Avoir pitié de vous, oui. Je me demande ce qui est arrivé à mon amie et partenaire…'
Non, ce n'est pas vrai. Ça ne s'est pas passé comme ça.
"…qu'elle soit si aveugle, si *stupide* pour écouter ce genre de baratin de l'homme le plus corrompu de la ville. Je me suis trompé sur vous tout ce temps, Lois. Je pensais que vous étiez amoureuse de Superman parce qu'il était bon et essayait de protéger et d'aider les gens. Il semblerait, après tout, que vous ne soyez intéressée que par le pouvoir, et ne pouvant l'obtenir vous vous êtes jetée sur l'être *humain* le plus riche et le plus puissant que vous avez trouvé."
Non !
"Eh bien, profitez-en pendant qu'il est temps, Lois… parce que Luthor ne s'en sortira pas toujours; un jour, et ce jour viendra bientôt, il fera une erreur, et je l'attendrai. Et alors Lex Luthor devra affronter la justice, et tout son argent et son pouvoir n'y pourront rien. Il sera démasqué au monde comme l'escroc qu'il est, et je resterai là à regarder."
"Peut-être que vous devriez commencer à vous préserver. Vous aurez sans doute besoin, vous aussi, d'un avocat et les capitaux de ce 'cher Lex' seront sûrement gelés par e Tribunal. C'est ce qui va se passer si *je* m'en mêle."
Non, non…
"Bonjour, cher mari."
"Bonjour, ma femme."
"Où aviez-vous disparu ?"
"Oh, je devais m'occuper d'une petite affaire privée -- une affaire avec un vieux concurrent."
"Lex ! Le jour de notre mariage ? Pendant la réception ?"
"Ces choses surviennent au plus mauvais moment, mais un homme avisé s'en occupe quand il en a l'opportunité. De plus, je voulais m'assurer que je ne serais pas… dérangé… pendant ma *nuit* de noces… et au moins pendant le mois suivant. Ce qui n'arrivera plus maintenant. Pas à cause de cette personne. Plus jamais, d'ailleurs."
"Oh, d'accord. Oh, au fait où mène cette porte par laquelle vous êtes arrivé ? Et quelle est cette étrange pierre brillante que je vois dans votre dos ?"
"Elle concerne cette affaire, ma chère. C'est même la plus grande partie de cette affaire."
Non ! Non !
"Superman ! Que me vaut cet honneur…inattendu de votre visite ?"
"Laissez tomber les plaisanteries, Luthor. Je suis ici pour vous transmettre un message. Deux, en fait."
"Vraiment ? Et que contiennent-ils ?"
"Le premier est… vous avez gagné."
"Oh, oui… et qu'ai-je gagné exactement ?"
"Tous les petits jeux que vous jouez avec moi depuis que j'ai sauvé 'Prométheus' et que j'ai découvert que vous étiez le cerveau derrière le sabotage du programme spatial d'EPRAD. Vos diverses tentatives pour me tuer, me discréditer ou me forcer à quitter Métropolis, les multiples critiques, les cyborgs, les fuites d'installations nucléaires et tout le reste--je suis sûr que vous vous en souvenez.
"Eh bien, j'en ai assez. Jusqu'à maintenant, j'ai réussi à contrecarrer la plupart de vos plans, mais maintenant vous avez fait quelque chose que je ne peux pas interrompre, contrôler ou à quoi je ne puis échapper. Alors… vous avez gagné. Vous serez heureux d'apprendre, quand je serai parti, que personne n'entendra plus jamais parler de Superman. Ni à Métropolis, ni nulle part ailleurs.
"Mais avant de penser à votre triomphe, vous devez entendre mon *autre* message. Et bien que vous ayez gagné, votre victoire est factice. Vous voyez, vous avez peut-être ruiné ma vie, comme vous l'avez fait avec d'autres, mais je ne vous laisserai *pas* faire la même chose avec Lois Lane. Et nous savons tous les deux ce qui va lui arriver si elle vous épouse. Alors, au revoir, Luthor, et puissiez-vous brûler en enfer comme vous le méritez."
"AAARRRRGGGGGHHHHHH!"
"Lex ! Oh, mon Dieu, Lex !"
"Lois je ne savais pas que vous étiez là. Je suis… désolé que vous ayez assisté à cela."
"Superman ! Vous… vous l'avez *tué* !"
"Oui, je l'ai tué. Et maintenant qu'il est mort, la vérité en ce qui le concerne sera mise au grand jour, et vous saurez pourquoi. Je suis désolé que ça se soit terminé comme cela, mais c'était lui ou vous."
"Ou *moi* !" Vous essayez de me dire que vous avez tué l'homme que j'allais épouser pour *mon* bien ? Pourquoi, vous--"
"C'est exact, Lois. Oh, vous ne me croyez pas, je le sais--mais, de toute façon vous n'avez jamais rien cru de ce que je vous ai dit au sujet de Luthor. Toutefois, maintenant vous allez découvrir la vérité. Qui sait, peut-être que vous pourrez me pardonner, une fois que vous aurez compris. Bien que cela n'ait aucune importance, étant donné que nous ne nous reverrons jamais. Au revoir, Lois."
Non, non…non, non, non, non…
"Lex Luthor, vous êtes en état d'arrestation. Vous êtes inculpé de meurtres, tentatives de meurtres, incendie criminel, chantage, fraude, vol, agression et voies de fait, et de complicité pour tous ces crimes. En outre, il existe une longue liste de différents méfaits pour lesquels vous serez également inculpé au Commissariat Central de Métropolis. Vous avez le droit de garder le silence--"
"Lex ! Inspecteur Henderson ? *Superman ?* Que se passe-t-il ?"
"Ce qui se passe, *Mme Luthor* c'est que votre mari est *tombé !* Il ne m'a pas fallu aussi longtemps que je ne l'aurais cru. Votre nouvelle épouse vous aurait-elle davantage distrait que vous ne l'espériez, Luthor ? On dirait qu'elle a relâché votre attention, et maintenant vous allez le payer !"
"Oui, c'est exactement cela; menacez et fanfaronnez à votre guise, mais vous n'allez pas vous en tirer *cette* fois. La police et le FBI ont toutes les preuves pour vous mettre hors d'état de nuire, et aucun de vos politiciens complaisants ou véreux ne va pouvoir vous en sortir. Vous allez vous retrouver en prison, Luthor, pour le reste de votre misérable vie ! Emmenez-le, Inspecteur."
"Avec plaisir, Superman. Oh, et remerciez votre ami Kent pour moi, voulez-vous ? Entre vous et lui, nous avons le dossier le plus solide que le bureau du Procureur n'ait jamais vu. Allez, Luthor; vous avez rendez-vous avec le juge--et le Grand Jury !"
"Mon Dieu, Superman… C'est… horrible. Vous aviez raison… pendant tout ce temps, vous et Clark aviez raison. J'arrive à peine à le croire, mais toutes ces preuves… mon mari est un monstre…"
"Oui, en effet. Il l'a toujours été. J'ai essayé de vous le dire, mais vous n'avez pas écouté. Oh, non, la grande Lois Lane peut dire à quoi ressemble un homme. Eh bien, Mme Luthor, j'espère que vous avez apprécié votre mariage pendant… combien, deux mois ? Parce qu'il est définitivement *terminé* . Aucun juge n'acceptera de libérer Luthor, pas avec les charges qui pèsent contre lui, et il ne sera pas libéré, jamais. La seule question que je me pose est combien de temps va-t-il survivre en prison; c'est un habile stratège, mais il y a un nombre incalculable de ses anciens employés en prison qui ne sont là uniquement que parce qu'il les y a envoyés--et maintenant qu'il a perdu son pouvoir, ils vont se faire un malin plaisir à prendre leur revanche. Je ne pense pas que les gardes vont s'en inquiéter; ils s'amusent toujours beaucoup quand les 'gros bonnets' reçoivent ce qu'ils méritent, et Luthor ne pourra pas acheter de protection, plus maintenant.
"Eh bien, voilà. Enfin, bon débarras ! Au revoir, Mme Luthor. Je suppose que je vous reverrai au Tribunal…"
Whoooooosh…
NOOOOOOOOOOOOOOONNNNNNN !
"Attendez, Superman! Revenez. S'il vous plaît… Clark, ne me quitte pas… s'il te plaît, Clark !"
"Clark ! *Claaaarrrrk !!*" cria Lois, en s'asseyant brutalement dans le lit. Elle balaya frénétiquement la pièce du regard, sans vraiment réaliser où elle était. Elle était tellement désorientée qu'il lui fallut quelques instants pour se concentrer sur le visage familier de son mari couché à ses côtés. Une fois qu'elle eut réalisé qu'il était là, qu'ils étaient ensemble, à la maison, dans leur chambre à coucher, leur fille dormant dans la chambre voisine, elle se jeta de l'autre côté du lit, l'entourant de ses bras en s'accrochant désespérément à lui.
Clark, qui s'était instantanément réveillé au cri de sa femme, essaya de répondre à son étreinte -- du moins si c'était comme ça que l'on pouvait appeler son geste -- mais il découvrit que ses bras étaient immobilisés. Il retira délicatement les mains de Lois, juste assez longtemps pour pouvoir se dégager puis il l'enlaça. Son expression horrifiée, tandis qu'il retirait ses mains, lui glaça le sang. Quand il l'enlaça à nouveau, elle le serra encore plus et fondit en larmes.
Il n'avait pas la moindre idée de ce qui avait pu l'émouvoir à ce point, mais il savait qu'elle avait besoin de lui, alors il continua de la serrer contre lui, caressant doucement ses cheveux, la rassurant encore et encore, lui rappelant que tout allait bien, qu'il était là... Finalement, ses pleurs se transformèrent en quelques sanglots, mais elle ne desserra pas son étreinte.
Au bout d'un moment, il la sentit se détendre et leva la tête avec précaution pour la regarder. "Chérie," murmura-t-il, d'une voix calme et forte pour ne pas lui montrer l'inquiétude qu'il ressentait. "Qu'est-ce qui ne va pas ? Que s'est-il passé ?"
Il fallut un moment à Lois pour réaliser qu'il avait dit quelque chose, mais elle semblait enfin émerger, du moins partiellement, du brouillard de souffrances qui la tenait. "Oh, Clark," renifla-t-elle, "Oh, mon Dieu, c'était horrible..."
"Qu'est-ce que c'était, chérie ?" insista Clark.
Lois frémit et cette réaction physique sembla la réveiller tout à fait. "Je suis désolée, Clark," dit-elle, "C'était juste un cauchemar."
'*Juste* un cauchemar ?' "Il devait être plutôt terrible pour te bouleverser à ce point, mon ange. Veux-tu en parler ?"
"Pas vraiment... mais peut-être que je devrais. C'était seulement... oh, c'était il y a cinq ans, quand j'étais fiancée à Lex." Grâce à son super self-control Clark parvint à se retenir de réagir et a réfréner la tension qui serait montée en lui s'il s'était laissé aller. Ce n'était pas une époque dont il aimait se souvenir et sur laquelle il désirait s'appesantir.
"...et je m'étais arrêtée à ta hauteur dans la Mercedes décapotable que je lui avais empruntée et nous avions commencé cette conversation -- mais ce n'était pas la même, parce que tu ne voulais pas monter dans la voiture et tu étais fâché avec moi, m'accusant de n'être attirée que par le pouvoir..."
Elle s'interrompit pour essuyer ses yeux. "...et puis tout a changé, j'étais à la réception, je parlais à Lex. Il venait juste d'entrer dans la pièce et, derrière lui, il y avait une lueur verte et je me suis rappelée ce que tu m'avais dit sur cette cage...
"Ensuite, j'étais dans son bureau et toi aussi. Tu disais qu'il avait gagné, mais que tu n'allais pas le laisser ruiner ma vie de la manière dont il avait ruiné la tienne et… et tu l'as *tué* avec ta vision à infrarouge ! Puis, tu m'as dit que je comprendrais peut-être un jour pourquoi tu avais dû faire cela, mais que ça n'avait pas d'importance car jamais plus je ne te reverrais.
"Et tout a encore changé, tu étais avec l'Inspecteur Henderson et vous arrêtiez Lex. Je devais être mariée avec lui, parce que tu n'arrêtais pas de m'appeler 'Mme Luthor' et tu espérais que j'avais apprécié les derniers mois, parce que maintenant c'était terminé. Et ensuite..." Sa voix se brisa dans un autre sanglot. "Et puis... tu t'es envolé et j'étais *toute seule*..."
"Chut..." dit-il doucement, tandis qu'elle enfonçait sa tête dans le creux de son épaule. "C'était seulement un rêve, mon amour. Rien de tout cela n'est arrivé. Et je ne vais jamais te quitter. Plus jamais, je te le jure, tant que je serai en vie."
Il resserra son étreinte autour d'elle, ce qui eut l'air de marcher. Son corps trembla une dernière fois et se détendit. Il leva vers lui le visage de Lois et embrassa tendrement ses lèvres. "Tout va bien, mon amour. Détends-toi et dors. Je suis ici, je t'aime et je ne vais pas te quitter."
Elle resta ainsi un instant, à le regarder dans les yeux, avant de sourire un peu puis elle posa sa tête sur son épaule -- mais lentement cette fois, confortablement, sans précipitation ni détresse. En fait, elle était heureuse. Elle s'endormit très vite et son mari se souvint d'une autre fois où elle s'était endormie presque tout de suite après avoir été rassurée; ce soir il n'y avait pas de Farceur essayant de la tuer, mais peut-être que la malveillance de Luthor et son "amour" morbide étaient une plus grande menace.
Clark tint longtemps Lois dans ses bras cette nuit-là, mais il y trouva très peu de plaisir, contrairement à l'habitude. En fait, son visage était lugubre. 'Encore une question à laquelle Luthor devrait répondre.'

"Quelqu'un devra *expliquer* tout cela !" gronda Lex Luthor, frappant le poing sur la table de la salle de conférence avec insistance. "La LexCorp est *attaquée* ! Depuis les cinq derniers mois, les profits sont devenus des pertes, la productivité a diminué, les stocks de la moitié des filiales qui sont encore cotées en Bourse ont du plomb dans l'aile... la compagnie entière est en train de mourir d'une hémorragie ! Je n'ai jamais *eu* à vendre de titres de toute ma vie, mais si je ne continue pas de me débarrasser des actions de mon portefeuille personnel -- des actions qui sont *supposées* me fournir le capital pour diversifier mon champ d'action -- nous allons avoir un problème d'argent et nous allons devoir nous mettre en redressement judiciaire !
"La *LexCorp* qui se cache de ses créanciers ! C'est impensable !
"Il *doit* s'agir d'un acte délibéré ! Il y a cinq mois, la compagnie était aussi saine qu'elle l'avait toujours été. Pas aussi *grande* qu'elle l'avait été, mais ce n'était qu'une question de temps; si mon... *rejeton* et son pantin d'acteur avaient réussi à reprendre un tel nombre de mes anciennes filiales, alors le faire moi aussi devait être assez facile. Ensuite, une fois la compagnie revenue à sa taille originale, elle aurait pu s'étendre encore davantage. Maintenant... *maintenant*, on se bat bec et ongles pour rester solvable !"
Michael Van Allen, Président de la Banque Industrielle Lexor, observait la scène, avec un visage de marbre, pendant que son employeur tempêtait. Derrière son regard sans expression, cependant, il était franchement amusé de voir le grand Lex Luthor frapper son bureau comme n'importe quel dirigeant d'entreprise faisant face à l'éventualité de la chute de sa compagnie. Luthor n'avait pas à faire face à des actionnaires furieux -- il y avait un mur entier de subalternes et de sociétés pour le protéger de cela -- mais aucun groupe de plaignants ne pouvait causer à cet homme plus de frustration et d'anxiété à son ego et son amour-propre. Il ne l'avait jamais admis, mais la LexCorp était plus qu'une compagnie pour son propriétaire; c'était le premier instrument de son pouvoir, une extension de sa personnalité et une expression de son image et, à ce titre, Luthor prenait les problèmes actuels de façon *très* personnelle.
Tellement personnelle, en fait, que Van Allen avait noté mentalement de prendre des précautions supplémentaires pour s'assurer que Luthor ne découvre jamais qu'il avait tiré avantage des problèmes de la LexCorp pour faire gonfler son propre nid. Plusieurs des titres que Luthor avait été obligé de vendre avaient trouvé preneurs, par des chemins sinueux et à des prix remarquablement bas, dans son propre portefeuille et il se doutait bien que leur ancien propriétaire les surveillerait de très près, si jamais il devait l'apprendre.
Les chances étaient très minces qu'il le découvre; des titres restaient des titres et si Luthor parvenait à regagner du terrain et réussissait à reconstruire son portefeuille -- ou *quand* -- il pourrait facilement remplacer ce qu'il avait été forcé d'abandonner sans avoir besoin de racheter exactement les mêmes titres. Et c'était cela, en tant que spécialiste de la Bourse, qu'il allait probablement faire. D'un autre côté, Luthor était juste assez paranoïaque et vindicatif pour décider de chercher à savoir qui avait mis la main sur "sa" propriété, et il pouvait retracer les transactions ordinaires avec facilité.
Ainsi, Van Allen se dit que plus il mettait de protection entre lui et ses nouvelles acquisitions, mieux ça vaudrait. Il avait déjà pris des précautions contre les enquêtes le la COB -- après tout, la définition de "délit d'initié" ne s'appliquait pas à ce cas -- mais la prudence était de mise -- *c'était* probablement nécessaire; la *dernière* personne qu'il voulait avoir à ses trousses était un Lex Luthor furieux, qui ne croirait pas que son employé n'avait rien à voir avec les problèmes ayant entraîné la vente de certains de ses titres et avait saisi l'opportunité d'acquérir des actions de valeur à un prix très bas.
Van Allen voyait pourquoi Luthor ne croirait pas à son innocence. Des rumeurs sur les malheurs de la compagnie, aussi vraies que fantaisistes à outrance, étaient parvenues aux oreilles du monde financier et les requins commençaient à accourir en réponse à l'odeur de sang qui se répandait. Même si elle devait encore racheter tous les titres de ses filiales qui s'étaient trouvés cinq ans auparavant sur le marché à cause de son démantèlement, la LexCorp n'était pas une compagnie nationalisée ou en société -- *Lex Luthor* partager ses possessions avec quelqu'un ? Ha, ha ! -- aussi c'était soi-disant sans risque aux dires des acheteurs et des autres, mais il y avait plus d'une manière de plumer un canard et les requins de la finance les connaissaient toutes.
Le fait même que Luthor ait dû mettre la main à son portefeuille personnel d'actions, était une bonne indication que la pression se faisait sentir; il ne se serait pas résolu à utiliser de telles mesures à moins que la compagnie ne soit réellement dans le pétrin *ou* qu'elle soit incapable d'obtenir l'aide financière dont elle avait besoin -- ce qu'à l'ordinaire les banques se seraient empressées de fournir. Financer la *LexCorp* ?* Quel coup pour une banque de pouvoir s'en vanter ! LexCorp n'avait *jamais* demandé d'aide extérieure; c'était le travail de ses propres banques. Le marché serait mort de faim depuis des années s'il avait eu à dépendre de la LexCorp pour faire des affaires.
Alors, si personne ne voulait s'engager à fournir des fonds à la compagnie, c'est qu'elle avait des problèmes plus que sérieux et Van Allen en arrivait à la même conclusion que son patron, que ce devait être un geste délibéré. Le nombre de problèmes incalculables tombant sur presque toutes les filiales de la compagnie, lesquelles tournaient parfaitement -- à la satisfaction de Luthor -- il y avait quelques mois, indiquait que c'était plus que de la déveine.
La présente situation n'était rien d'autre qu'une succession de malchances, théorie semblant être acceptée par la majorité des gens qui travaillaient à la compagnie (à défaut d'une meilleure explication, d'autant que ça n'incluait pas l'incompétence du personnel), ce qui aurait demandé à chaque employé de transgresser toutes les règles possibles et imaginables de superstition sur la "malchance", tous ensemble et à répétition. Même trébucher sur un chat noir en passant sous une échelle et en marchant sur les crevasses du trottoir, puis tomber dans la vitrine d'une boutique de miroirs, en jetant du sel *et* regarder la lune par-dessus votre épaule gauche pendant que vous tombiez, *tout cela* un vendredi 13, aurait pu provoquer *toute* cette malchance ! La situation était passée de mauvaise à désespérée au cours des dernières semaines et l'humeur de Luthor (et -- pensait-il même -- *sa santé mentale*) s'était détériorée en proportion directe avec l'état de la LexCorp.
Non, il y avait des gens derrière cela. Mais qui ? Et comment faisaient-ils ?

"Hé, Nicky ! Viens voir ça -- notre bon vieux Lex va adorer !"
"De quoi s'agit-il, Alex ?" Nick Trifyllis s'approcha de l'ordinateur en ronchonnant et jeta un coup d'œil à l'écran par-dessus l'épaule de son frère. Il ne voulait pas vraiment entendre parler de la dernière tentative de détournement informatique d'Alex, mais il savait par expérience que c'était plus rapide et moins problématique de feindre de l'intérêt que de se taper des heures d'explications répétées.
"Tu te rappelles comment nous sommes entrés dans les dossiers de recherche de LexLabs, la semaine dernière ? Et bien, j'ai découvert que leur division médicale va bientôt soumettre un nouveau médicament contre le cancer qui sera testé par le Contrôle Pharmaceutique. Tous les rapports rédigés par la compagnie disent que ça va leur rapporter beaucoup -- mais pas si j'ai mon mot à dire dans tout ça !" Il ricana et s'étira sur son siège, en faisant craquer ses jointures. Nick sourcilla légèrement; il avait vu Alex comme ça auparavant et cela signifiait toujours que quelqu'un allait avoir des problèmes -- mais, c'était bien le but, n'est-ce pas ?
"Tu aimes vraiment ça, n'est-ce pas ?"
"Hé, pourquoi est-ce que je n'aimerais pas ça ? C'est le rêve de tout pirate informatique; avec ces codes qui nous ont été donnés par... tu-sais-qui, je vais accéder aux ordinateurs de la LexCorp. C'est tout ce dont j'avais besoin -- c'est ce dont un bon pirate informatique a besoin; je n'ai eu qu'à bricoler un peu et maintenant, j'ai accès à presque tout le système de la compagnie et *ça* me permet de fouiller un peu partout dans le système. Je veux dire, regarde ça : en touchant au rapport du Contrôle Pharmaceutique, je vais pouvoir sauter du Pentagone, à la Brigade des Stupéfiants, à Interpol à Paris et même à la NIA ! Que penses-tu de *ce* piratage, mon frère ?"
"Quoi ? T'es cinglé, Alex? La *NIA* ? Que *diable* fais-tu, en te frottant à ces gens ? As-tu la moindre idée de ce qu'ils nous feront si tu entres comme ça dans leurs ordinateurs ?"
Alex pivota sur sa chaise pour jeter un œil à son frère; son air joyeux avait maintenant disparu et sa voix était tranchante quand il répondit : "Ils ne peuvent rien faire de pire que ce que Luthor fera quand il découvrira ce que nous avons fait à sa précieuse LexCorp! Ils ne feront rien, pas plus que lui. Allez, Nick, fais confiance à mon intelligence, d'accord ?"
Nick ne dit rien, pris de court par le brusque changement d'attitude de son frère. C'était facile, même pour lui après tout ce temps, de sous-estimer Alex. Ce garçon donnait l'impression que travailler avec des ordinateurs n'était qu'un jeu, mais il suffisait de douter de lui et une personne totalement différente émergeait, une personne qui prenait ce qu'elle faisait *très* au sérieux et qui s'attendait à ce que vous fassiez de même.
Les regards des deux frères se croisèrent quelques instants avant que Nick ne détourne la tête, disant, "Je suis désolé... j'étais un peu retourné. Je sais que tu es bon, Alex, mais..." Il se tut, incapable de dire ce qu'il voulait dire sans y ajouter une insulte. Puis, dans un effort évident de réconciliation, il sourit et poursuivit, "Je crois que tu devrais me montrer encore une fois *à quel point* tu es bon ! Que fais-tu ?"
Le sourire d'Alex s'ajouta à celui de son frère, son enthousiasme revenant instantanément. "Ne t'en fais pas, Nicky," le rassura-t-il, "Personne ne va me découvrir, pas de la manière dont je peux rediriger mes commandes. Même s'ils trouvent les fichiers que j'ai mis dans la corbeille, là et ailleurs, il est impossible à quelqu'un de connaître leur provenance. Même *moi*, je ne le pourrais pas, parce que j'utilise un programme sélectif de séquences; comme ça, je sais où les fichiers aboutissent, mais je ne sais pas par quel chemin ils sont passés pour arriver ou encore le nombre de connections qu'il a fallu pour y parvenir -- sauf que je sais qu'il y en a plus de six, parce que c'est la donnée minimale que j'ai placée. Il est déjà presque impossible de retracer un seul transfert de ce genre, parce que tu dois avoir des codes d'accès à chaque bout, mais *six* ? N'y pense même pas !"
"Si tu le dis..." murmura Nick. "D'accord, alors on est en sécurité. Parle-moi de ce truc avec le Contrôle Pharmaceutique."
Alex se mit à rire. "Tu vas adorer. LexLabs est sur le point de télécharger ses dossiers de recherche au Contrôle Pharmaceutique et quand elle va le faire, mon bébé entrera en action. Pour commencer, ce que les types de Washington vont recevoir ne sera *pas* ce que les gars des laboratoires auront envoyé ! En fait, c'est tout le contraire qui va se produire : ce que le Contrôle Pharmaceutique *et* la NIH vont recevoir c'est une demande pour homologuer le médicament -- ou du moins ce qu'ils *croiront* être le médicament; la composition chimique sera modifiée… un petit peu -- et sera déclarée comme étant une substance dangereuse. Tous les tests préliminaires de LexLabs vont être remplacés par des images similaires des archives des Armes Chimiques de l'Armée. Le Contrôle Pharmaceutique va penser que ce 'médicament miracle' est la pire des choses depuis le gaz moutarde !
"Bon sang, j'aimerais être une mouche quand le laboratoire va avoir la réponse des fédéraux. Au lieu du programme de contrôle normal auquel ils s'attendent, le grand espoir de la LexLabs Médical va être placé sous le contrôle du Service des Substances Dangereuses; personne n'aura le droit de *s'approcher* de ce truc sans une combinaison de protection et des procédures de décontamination massives -- sans parler du stockage et des protocoles d'élimination. Le Contrôle Pharmaceutique va probablement recommander également que la question soit portée devant les autorités compétentes !"
Nick ne dit rien, mais ses sourcils se dressèrent de surprise. Alex le remarqua et poursuivit gaiement : "Et, pour ajouter l'insulte à la blessure, tous les *vrais* dossiers de recherche auront mystérieusement disparu des ordinateurs de la LexCorp, mais, après d'autres modifications des codes -- hé, qu'est-ce que tu dirais si on commençait par les envoyer à la Maison Blanche -- ils vont aussi mystérieusement apparaître dans les banques de données d'une demi-douzaine *d'autres* établissements faisant de la recherche -- comme STAR Labs, l'Université de Métropolis et quelques-unes des grandes compagnies pharmaceutiques ! Ces fichiers seront portés à l'attention de personnes comme Bernard Klein après environ une semaine. Il faudra plus de temps à LexLabs pour découvrir qu'ils ont perdu leur base de données -- et ils ne pourront *jamais* s'en remettre !"
A ces mots, Nick faillit éclater de rire et son petit rire fut comme de la musique aux oreilles de son frère, c'était la chose la plus proche d'un véritable rire sortie de sa bouche depuis des semaines. Nick avait été très déprimé depuis que Chris avait été tué et c'était bon d'entendre qu'il allait peut-être un peu mieux. Ce n'était pas grand-chose, mais c'était un début et, comme le piratage, on pouvait faire un long, long chemin une fois qu'on avait commencé...
Le commentaire qui suivit ce rire fut également le bienvenu : "Wow, Alex, tu ne fais pas les choses à moitié, n'est-ce pas?"
"Pas quand ça concerne la LexCorp, en effet." C'était maintenant au tour d'Alex de perdre tout sens de l'humour; sa voix était froide et dure -- mortelle, même. "Je vais la *détruire*, Nicolas. Je vais m'assurer que M. Lex Luthor perde chaque centime qu'il possède et ensuite je prendrai sa peau d'assassin minable et *la clouerai au mur* !"
Nick observa son frère avec une soudaine appréhension. Ce n'était pas l' Alex qu'il connaissait, pas du tout -- ou du moins, ça *n'était plus* lui, ces derniers temps. Son petit frère avait changé quand il avait appris qui était responsable de la mort de Chris; la plupart du temps, c'était encore un bon vivant qui aimait se la couler douce, comme il l'avait toujours été, mais il perdait son entrain assez souvent et un autre Alex émergeait avec une nouvelle et effrayante obsession. Alex avait toujours été sujet à l'obsession -- quel pirate informatique ne l'était pas ? -- mais maintenant, il y avait en lui quelque chose de différent. Quelque chose de froid, dur et sombre.
Et, pour aggraver les choses, Nick réalisait qu'il n'avait aucune idée de l'ampleur du plan d'Alex. Aider Beth Luthor à mettre son mari en prison était une chose, mais Alex semblait avoir décidé que ce n'était pas suffisant; il allait réduire en morceaux la LexCorp, voler Luthor de tout ce qu'il possédait... et ensuite quoi ? Le tuer ? Nick commençait à croire que c'était exactement ce qu'Alex avait en tête.
Il ne pouvait se sortir quelque chose de la tête -- un vieux proverbe que son grand-père lui avait cité une fois, des années auparavant : Avant de te lancer sur le chemin de la vengeance, rappelle-toi de creuser *deux* tombes.

"Très bien, Michael, ce sera tout. Je veux que ces comptes de la LexAir aient été revus pour demain midi."
"Oui, monsieur. Ils seront prêts. Oh... ça me rappelle ceci : j'ai des nouvelles de notre Directeur-détourneur-de-fonds-disparu, Owen Preece."
"Vraiment, déjà ? Serait-il possible qu'il y ait de *bonnes* nouvelles pour changer ? Allez-y."
"Eh bien, monsieur, tout d'abord, veuillez me pardonner de ne pas avoir porté cela plus tôt à votre attention, mais nous avons attendu jusqu'à ce que nous ayons quelque chose de concret à rapporter, plutôt que de vous faire perdre votre temps avec des hypothèses..."
Luthor fit un signe impatient de la main, le message silencieux "Crachez Le Morceau !". C'est donc ce que fit Van Allen : "Je n'ai pas besoin de vous rappeler que la dernière fois que nous avons entendu parler de Preece, c'est quand il a retiré 300 000 dollars de son compte bancaire personnel après une erreur informatique 'très commode'. Puisqu'il a pris l'argent en liquide, nous n'avions aucun moyen de remonter jusqu'à lui -- ou c'est plutôt ce que nous pensions. Nous avions tort."
A ces mots, Luthor se pencha en avant et laissa Van Allen poursuivre, "Nous avions tort parce que nous étions -- à ce moment-là -- dans l'ignorance des initiatives d'une jeune caissière du rez-de-chaussée. Cette jeune femme, dont le nom est Sarah Hudson, réalisa que prendre tant d'argent en espèces était très inhabituel de nos jours, tout particulièrement quand la personne qui le prend est le Directeur de la Division Informatique -- qui, comparé à d'autres, doit être habitué aux transactions bancaires électroniques. Elle a trouvé cela *tellement* étrange que, sans même prendre le temps de consulter son supérieur immédiat, elle a décidé qu'elle devait prendre une initiative et c'est ce qu'elle fit. Elle a fait exactement ce qu'elle avait appris, en cas de hold-up; elle a activé les dispositifs de sécurité installés dans les cabines des caissiers."
"Quoi ?" dit Luthor. "Vous voulez dire que..."
"Oui, monsieur," répondit un Van Allen tout souriant. "Les 300 000 dollars en totalité ont été marqués par le système LexTrace. Les billets n'ont pas l'air différents, mais chacun d'eux a été recouvert d'une teinture traçante et peut être formellement identifié comme faisant partie de l'argent que Preece a retiré en l'exposant à un détecteur.
"Quand j'ai appris cela, j'ai averti tous nos bureaux et toutes les banques qui ont acheté le système LexTrace -- et, comme vous le savez, ça a été une des plus belles ventes de la Division Sécurité cette année. Après cela, la seule chose à faire était d'attendre.
"Hier, l'attente a été récompensée. Nous avons reçu un communiqué de la Banque Agricole et Industrielle Columbus nous prévenant qu'ils avaient reçu quatre billets marqués d'un client local -- un supermarché. Ils ont fait une enquête et le supermarché était certain que les billets avaient été encaissés dans le magasin au cours des deux derniers jours. Ce ne sont pas des preuves concluantes, mais..."
"Mais ça nous dit qu'il y a de fortes chances que monsieur Preece soit en Ohio ou du moins qu'il y était ces derniers jours," l'interrompit Luthor. "Oui, ce sont des bonnes nouvelles, Michael." 'Plus que vous le ne croyez, parce que je connais certaines choses à propos du système LexTrace que vous ignorez...' "C'est plus que suffisant pour faire avancer les choses. Avertissez-moi des développements de cette affaire."
Van Allen acquiesça, se leva et s'apprêta à partir. Avant qu'il n'atteigne la porte, Luthor lui dit une dernière chose : "Oh, et Michael... Je pense que Mlle Hudson a mérité une promotion, vous ne croyez pas ? L'initiative et le jugement dont elle a fait preuve ne doivent pas être ignorés."
Le banquier acquiesça à nouveau et s'en alla. Luthor s'assit en silence quelques instants puis pressa le bouton de son interphone. "Mlle Barrows, venez s'il vous plaît. J'ai un travail pour vous..."

Enrico O'Reilly n'était pas un homme heureux. Et il y avait une raison. Pas mal de raisons, en fait.
Pour commencer, il était plus ou moins en permanence dans une semi-torpeur et était comme ça depuis qu'il avait été arrêté. Il ne pouvait pas se rappeler ce qui s'était passé immédiatement avant que les policiers ne le prennent, mais peu importe ce que c'était, il avait du subir un sacré choc; ça lui avait provoqué des hallucinations et lui avait laissé une impression dont il n'arrivait pas à se débarrasser, même maintenant, l'impression que quelque chose *clochait* dans son corps.
Les choses s'aggravaient quand il dormait, les hallucinations intermittentes prenaient la forme de rêves étranges dans lesquels il était une espèce d'animal -- et en même temps ne l'était pas! Mais, même lorsqu'il était lui-même, il se trouvait face à un personnage flou mais terrifiant -- il y en avait peut-être même deux -- qui le menaçaient. Il se réveillait invariablement de ces rêves en hurlant et il en était arrivé, pour cette raison, à avoir une peur panique de dormir. Malheureusement pour lui, les médecins de la prison n'avaient pas pu faire grand-chose pour lui, à part lui prescrire des tranquillisants.
Pendant ses quelques moments de lucidité, il devait aussi affronter la réalité qu'il était sur le point d'être jugé pour le meurtre du mécanicien aéronautique -- qu'il avait, effectivement, assassiné -- et il n'avait pas beaucoup de chance de s'en tirer. Pas alors qu'il avait été assez *stupide* pour se faire prendre avec l'arme du crime et des traces de sang sur ses chaussures. Les policiers avaient réussi à le confondre au bout d'une journée d'expertise et son avocat l'avait avisé qu'il s'agissait d'un cas flagrant. La défense pouvait demander toutes les expertises professionnelles qu'elle voulait, mais il y avait très peu de chances que ça avantage le prévenu.
L'avocat avait parlé d'une responsabilité réduite quand il avait été averti des cauchemars d'Enrico par un gardien "bienveillant". Enrico ne voulait pas en entendre parler et il n'aimait pas du tout cette idée. La prison était un endroit assez difficile, mais s'en sortir pour cause de folie voulait dire qu'il allait atterrir dans un asile de fous ! Pas question -- il n'était pas fou, il ne *l'était pas* ! Il avait juste ces rêves dingues...
Et il n'y avait pas d'autre chance de diminuer les charges, même si les flics ne pensaient pas avoir rassemblé toutes les preuves contre lui. Enrico n'était pas le seul à qui son avocat donnait des conseils; la confidentialité ne voulait rien dire pour Lex Luthor et un brave avocat allait tenter de l'invoquer -- spécialement quand Luthor payait la facture.
La "confidentialité", d'un autre côté, était *attendue* et rien de moins ne serait toléré. On le lui avait dit très clairement, tant son avocat, qu'assez subtilement un grand nombre de personnes de la prison -- y compris les membres du personnel *et* les prisonniers -- que la seule manière pour lui de survivre était de garder son clapet fermé sur les affaires de Luthor.
Cela ne l'avait pas surpris. Il savait, depuis le moment où il avait été arrêté, qu'il n'était pas question de négocier avec le procureur -- et espérer survivre. Il en savait trop et Luthor le tuerait s'il lui parvenait aux oreilles le moindre murmure soupçonnant Enrico d'avoir pu dire quelque chose qu'il n'aurait pas dû.
Luthor le voulait peut-être mort de toute façon, simplement pour être plus en sûreté. Non, Enrico savait que sa seule chance était d'être *agressivement* silencieux; qu'il ne devait absolument rien dire et le faire de telle manière qu'il soit évident qu'il n'allait pas trahir son employeur. Sauf qu'il avait du mal à se concentrer à cause des médicaments et il avait peur que quelque chose puisse lui échapper accidentellement quand il était drogué -- ce qui était le cas la plupart du temps.
Il n'avait pas le choix. Il savait, quand il parvenait à y réfléchir clairement, que c'était la seule façon d'avoir une chance que Luthor le reprenne pour travailler avec lui, s'il était ou quand il serait libéré sur parole; New Troy n'était pas un État aussi perméable, que, disons, la Californie, mais il avait entendu parler de types accusés de meurtres et qui étaient sortis après environ dix ans. Il n'aurait pas un boulot aussi bien que l'autre, bien sûr, mais le patron aurait toujours besoin de quelqu'un pour faire les sales besognes et il n'avait qu'à prouver qu'on pouvait lui faire confiance.
Le problème était que Luthor n'était pas le seul qui savait ou suspectait Enrico de connaître des choses pouvant porter préjudice à son employeur si elles étaient ébruitées -- et *ils* avaient aussi des contacts en prison. Il avait déjà sondé -- habilement, confidentiellement, mais néanmoins indéniablement -- un surveillant et quelques prisonniers, et il était assez sûr qu'ils travaillaient ensemble. Il ne savait pas pour *qui* ils travaillaient, même s'il avait quelques idées -- Intergang avait plus ou moins disparu de Métropolis après que les Church aient été emprisonnés, mais c'était une organisation internationale et quel meilleur moyen de prendre racine dans cette ville que de reprendre une opération déjà existante ?
Ce qui laissait Enrico marcher avec une corde autour du cou, parce qu'Intergang pouvait avoir encore moins de remords que Luthor (si c'était possible) de lui faire du mal s'il refusait de collaborer. Mais s'il *acceptait* de coopérer... eh bien, il savait ce qui risquait d'arriver. Heureusement, les types qui avaient fait les premières approches n'avaient pas réussi à tirer quoi que ce soit de lui même quand il était bourré de médicaments, mais il ne pourrait pas se fier à cela pour l'avenir. Pas plus qu'il ne pouvait se fier à aucun des deux camps pour le protéger, même s'il avait demandé à Luthor de faire quelque chose à ce propos, de peur que l'homme ne croie qu'il songeait sérieusement à parler; mais en faisant cela, il courait le risque que Luthor trouve plus facile d'éliminer le problème -- et lui.
Et malgré tous les dangers qui surgissaient de tous côtés, Enrico O'Reilly aurait très bien pu accepter la situation présente si ce n'était ce *stupide* surnom que les gardes lui avaient donné ! Un farceur avait vu ses initiales -- "E. O'R" -- sur de la paperasse et il avait été immédiatement baptisé du surnom "Eeyore", comme le personnage de dessin animé pour enfants ! S'il entendait ce… ce... *nom* une autre fois, Enrico allait devenir violent, avec ou sans médicaments -- sauf que ça allait aggraver encore plus la situation. Et encore, quelques jours de solitude l'éloigneraient de comparses d'Intergang... pendant un moment -- et peut-être qu'il pourrait se reposer un peu.

Clark terminait son article concernant un super sauvetage quand l'icône "Vous avez un message" s'afficha sur l'écran. Il n'attendait rien de personne, donc cela n'avait pas l'air urgent; de toute façon, Perry allait hurler s'il ne terminait pas cet article et un journaliste intelligent savait où placer ses priorités.
Quelques minutes plus tard, l'article avait été envoyé par le réseau vers la Rédaction et Clark se rassit sur sa chaise pour regarder son message, se demandant de qui il pouvait provenir. S'il avait de la chance, il serait peut-être de Lois, qui était aujourd'hui à la maison en train de surveiller Laura; s'il n'avait *pas* de chance, ce serait encore un de ces courriers publicitaires, qui, malgré tous les efforts des informaticiens du Planet, parvenaient encore à déjouer les filtres de la messagerie. Si ce n'était pas ça, il pouvait venir de *n'importe qui*.
Il venait du Dr Klein, qui demandait à Clark de passer à son bureau dans l'après-midi ou la soirée. Il y avait apparemment quelque chose qu'il voulait lui montrer et à la manière dont le message était formulé, Clark était presque certain que cela avait un rapport avec le décodage des dossiers sur le projet de clonage. Bernard se plaignait que son "comportement envers les malades" était trop brusque pour un travail médical, se disait Clark en souriant (lui, cependant, il n'avait pas à se plaindre), mais le scientifique pouvait être étonnement subtil dans ses "écrits"; sans doute à cause de tous les rapports qu'il avait écrits.
Tout ce qui concernait ces fichiers était hautement prioritaire, du moins en ce qui concernait Clark, et il était à peu près certain qu'il pouvait partir dès maintenant... mais il valait mieux s'en assurer d'abord avec Perry. Il baissa ses lunettes et jeta un rapide coup d'œil à son patron et, il en était à peu près sûr, le rédacteur en chef était en train de lire son article. Il se leva et se dirigea vers le bureau de Perry. Frapper à la porte provoqua le grognement habituel "l'invitant" à entrer -- celui qui ne faisait pas cela et qui l'interrompait avait intérêt à avoir un message important, sous peine de devoir couvrir une semaine les expositions canines.
Clark ouvrit la porte, mais n'entra pas dans la pièce, essayant de donner l'impression qu'il voulait partir dès que possible -- ce que, bien sûr, il voulait faire. "Chef," dit-il, "Avez-vous encore besoin de moi sur cet article du sauvetage effectué par Superman ? Je dois aller vérifier quelque chose à STAR Labs et j'aimerais bien y aller."
Perry leva la tête, cligna des yeux et ajusta son regard de l'écran de l'ordinateur vers le visage se tenant dans l'embrasure de la porte. "Non, Clark. Ça a l'air très bien, vous pouvez y aller."
Clark le salua, ferma la porte et se dirigea vers l'ascenseur. Quand il y parvint, il vit Jimmy en sortir avec une pile de photos dans les mains et se diriger vers la rampe d'accès. Il avait l'air pressé, mais, en le croisant, il s'arrêta et sourit. "Hé, CK, merci pour le conseil."
"Pas de problème, Jimmy," répondit automatiquement Clark. Puis *il* s'arrêta. Il devait partir -- quelle que soit la raison pour laquelle le Dr Klein voulait le voir, ce devait être urgent -- mais il ne pouvait pas *ne pas* demander : "Euh... de quel conseil parles-tu ?"
"De Penny et moi," répondit son ami. Clark ne semblant pas comprendre, Jimmy poursuivit, "Vous savez -- à propos du partage des tâches..." En disant cela, il lui fit un clin d'œil et plia le bras, comme s'il voulait donner un coup de coude à Clark, s'il avait été assez près.
Il fallut un moment à Clark pour comprendre ce à quoi Jimmy se référait, mais il se souvint finalement que Lois lui avait raconté la conversation qu'elle avait eue avec le jeune homme quand leurs esprits avaient été changés. Elle avait abordé ce sujet de façon appropriée au moment où tous deux étaient en train de faire le ménage -- Laura jouait gaiement par terre, c'était donc à une vitesse "normale" que Clark allait et venait dans la maison ce jour-là -- et il avait été ravi d'apprendre que leur ami pensait à fonder une famille. Il s'était également mis à rire -- et avait écarquillé les yeux -- à la description de Lois sur la façon dont elle avait essayé de convaincre Jimmy de faire sa part de tâches ménagères. A la plus grande joie de Clark, Lois avait une opinion similaire sur le sujet et, une fois le travail terminé, et que Laura avait mangé et était couchée pour la sieste, le couple avait procédé à la démonstration d'une autre merveilleuse pratique du temps économisé en partageant les tâches...
Ce souvenir le fit sourire, mais il le réprima (plus ou moins) et demanda, "Alors, est-ce que ça veut dire que vous allez..." Clark s'interrompit, se rappelant où il se trouvait. La salle de rédaction du Planet n'était rien d'autre qu'un foyer de potins et les gens comme Ralph n'étaient que trop impatients de connaître les détails de la vie personnelle de leurs collègues et de participer à répandre les nouvelles, les embellissant en les propageant. Lui et Lois avaient eu assez de problèmes avec ça -- il n'avait qu'à se rappeler comment Ralph avait présumé que Kate Martin était sa petite amie ! -- et il ne voulait pas exposer Jimmy à la même stupidité malveillante.
Jimmy paraissait moins inquiet, reprenant immédiatement la phrase là où Clark s'était arrêté. "Emménager ensemble ? Oui et non... on y pense -- on y pense *vraiment* -- mais on est encore tous les deux un peu nerveux. C'est une grande étape, vous comprenez ?"
Clark acquiesça. Il le savait. C'était exactement cela, dans son cas, c'était une étape qu'il avait attendue toute sa vie. Et il n'avait jamais été plus heureux que de franchir cette étape.
"Mais le week-end dernier, on a décidé d'essayer. Penny est venue chez moi et nous avons passé tout le week-end ensemble. On voulait savoir ce que ça allait donner quand on serait... hmmm, vieux et mariés..." Le ton de Jimmy devint hésitant et un peu plus qu'embarrassé à ces mots, mais Clark se contenta de sourire. "Alors, on est allé faire du shopping, on a préparé le dîner, lavé la vaisselle, regardé la télé... on a même fait le ménage !
"Penny était surprise de voir que je voulais l'aider. Je crois qu'elle s'attendait à devoir tout faire -- en réalité, étant donné l'expression qu'elle avait quand elle est entrée dans la maison, je crois qu'elle était soulagée de voir que l'endroit n'était pas si mal ! J'avais pris le temps de ranger un peu avant, mais pas trop, parce que je me suis rappelée de ce que vous m'aviez dit et je lui ai dit à peu près la même chose : il faut le faire et on peut le faire plus vite à deux, alors c'est une des choses qu'on a essayé de faire."
Jimmy rougit et jeta un rapide coup d'œil autour de lui pour voir qui pouvait l'entendre, avant de baisser la voix, "Je dois admettre que j'ai parlé de ce que vous avez dit à propos de faire ensemble les tâches ménagères pour avoir plus de temps pour... faire autre chose... et j'étais un peu nerveux à cette idée -- mais elle n'a rien dit, je pensais que j'avais mis les pieds dans le plat. Mais quand on a commencé, je crois qu'elle n'avait pas *envie* de dire quoi que ce soit... bon sang, je ne savais pas que nettoyer une maison pouvait faire *ça* à une femme !"
Le sourire de Clark s'agrandit. "Nettoyer une maison ne fait pas ça, Jimmy -- pas à moins que tu ne le *veuilles*. Je crois que tu as bien fait de mettre les pieds dans le plat. Continue d'avancer comme ça, parce que c'est ce qui compte vraiment. Ce qui me fait penser -- *je* dois y aller. A tout à l'heure."
"D'ac, CK. A tout à l'heure." Sur ce, les deux amis se séparèrent, l'un pour livrer ses photos et l'autre pour découvrir ce que le Dr Klein voulait lui montrer.

"Lois !" interpella Clark, qui fermait la porte d'entrée de la maison.
"Hé, Clark," dit sa femme, du haut des marches. Elle tenait Laura et elle regarda sa petite fille. "Regarde, mon poussin -- Papa est à la maison."
Laura gazouilla gaiement quand son père embrassa sa mère, puis il la souleva pour jouer avec elle; leur petit jeu consistait à ce que Clark souffle sur le ventre de Laura et ça ne manquait jamais de provoquer chez elle un gazouillement joyeux et un immense sourire.
Lois les regarda, satisfaite. L'une des joies méconnues d'être parents, qu'elle et Clark découvraient tous les deux, était qu'il y avait différents moyens de faire les choses avec Laura -- jouer, s'habiller, même faire les tâches ménagères dans la maison -- certaines propres à chacun d'eux et d'autres qu'ils pouvaient partager. Laura ne réagissait jamais aussi joyeusement quand Lois essayait de lui souffler sur le ventre, mais ce n'était pas grave; elle pouvait passer des heures à s'amuser au jeu des petits doigts avec sa mère, mais perdait rapidement l'intérêt quand Clark essayait. Non, il y avait des choses que Lois et Laura faisaient ensemble, d'autres que Clark et Laura faisaient ensemble et il y avait aussi d'autres activités que tous trois pouvaient faire, et c'était très bien comme ça.
Finalement, Clark posa Laura sur le sol du salon avec ses jouets, lui donna un baiser rapide, la regarda se mettre à jouer et comme il avait l'habitude de le dire, reporta son attention vers l'autre femme de sa vie. Ladite dame attendait cela et, pendant un petit moment, ils se concentrèrent sur certaines choses *qu'ils* aimaient faire ensemble...

"Alors, que voulait le Dr Klein, Clark ?" demanda Lois, en finissant son verre de vin. Le dîner était terminé, Laura dormait au premier et les deux journalistes se reposaient, assis sur le canapé. Clark décompressait de sa journée (de ses deux emplois) en la racontant à Lois, et elle, comme toujours, était curieuse de savoir ce qui s'était passé pendant que la sienne avait été relativement calme à jouer son rôle de mère.
"Il... avait quelque chose à me montrer," répondit Clark, d'un ton légèrement distrait. Il jeta un rapide super coup d'œil à Laura, pour s'assurer qu'elle dormait paisiblement, parce que son histoire allait prendre un certain temps...
"C'était au sujet du décodage des fichiers," poursuivit-il. "Le Dr Klein n'a pas eu beaucoup plus de chance d'en tirer quelque chose depuis la dernière fois où je lui ai parlé de ça. Bien sûr, il n'a pu travailler dessus qu'en dehors de ses heures de travail -- et tu sais à quoi elles ressemblent !"
Lois leva les yeux au ciel à ce commentaire. Si elle avait jamais vu un bourreau de travail, Bernard Klein en était bien un -- et qui mieux qu'elle connaissait cela ? Le pire était que c'était un *scientifique* et un bourreau de travail qui pouvait se perdre dans des équations ou dans des ordinateurs pendant des jours sans arrêter. Elle était parfois surprise de voir que cet homme pouvait abattre autant de travail "non-officiel" -- comme des tests sur la fertilité kryptonienne et le décodage de fichiers informatiques -- comme il le faisait.
"Alors, tu imagines ma surprise," dit Clark, "quand il m'a présenté les copies complètement décodées, de tous les fichier sur lesquels j'avais réussi à mettre la main *et* en plus une demi-douzaine d'autres!"
"Wow !" dit Lois en dressant les sourcils. "Comment a-t-il fait ?"
"C'est cela qui est étrange, chérie. Si l'on se fie à ce que le Dr Klein m'a dit, *il* n'a rien fait -- mis à part de vérifier son courrier électronique ce matin. Apparemment, il a reçu un message de quelqu'un qui dit s'appeler 'ANT '; tout ce que ça disait était quelque chose du genre : 'Sauvegardez ces fichiers sur disquette. Lane et Kent pourraient les trouver intéressants,' mais ces fichiers étaient attachés au message dans une espèce de format étrange. Bernard a essayé de les regarder avant de les télécharger, mais tout ce qu'il a pu voir était des caractères inconnus. Il a pensé qu'il fallait tout de même les sauvegarder et quand il l'a fait, les fichiers semblaient s'auto-extraire et se décoder -- *et* ils se sont supprimés de sa boîte aux lettres. Alors, il a à nouveau regardé le premier fichier, simplement pour voir ce qui s'était passé et il y avait un texte clair des rapports de LexLabs, datés d'avril 1994.
"Il les a parcourus et il a vu d'après les titres qu'il s'agissait des rapports évolutifs du projet de clonage. Il a reconnu quelques parties du texte de certains fichiers qu'il avait réussi à décoder et il s'est soudain aperçu que ce Ant lui avait envoyé toutes les données qu'il essayait de décoder depuis des mois !"
"Mais comment ?" dit Lois atterrée. "Et qui est ce 'Ant', et pourquoi ce type a-t-il dit au Dr Klein de *nous* donner ces fichiers ? Qui peut savoir qu'ils nous intéressent ?"
"J'y ai réfléchi en rentrant à la maison et je crois que je sais de qui il s'agit. Pense au mot 'ant' comme étant des initiales."
"Des initiales? D'accord... A-N-T... Bien sûr ! *A*lex et *N*ick *T*rifyllis ! Owen Preece n'a-t-il pas dit que Chris avait peut-être donné une copie des fichiers à Alex ? Il a dû réussir à les déchiffrer et les a envoyés au Dr Klein -- pourquoi ? Pourquoi pas directement à toi ou à moi ?"
"Je ne sais pas. Peut-être voulait-il qu'un scientifique les lise -- quelqu'un qui comprendrait ce qu'ils voulaient dire. Le Dr Klein est reconnu dans la communauté scientifique et nous avons écrit sur lui et l'avons cité assez souvent pour qu'il soit le choix logique de quelqu'un qui veuille nous passer des informations via une source experte. Alex et Nick ne savent pas tout ce qu'il a fait pour nous, ni qu'il a essayé de décoder les mêmes fichiers, mais ils savent qu'il connaît la science et que nous sommes proches. C.Q.F.D."
"Ça a du sens. D'accord, alors que contenaient ces fichiers ? Est-ce que ça veut dire qu'on a la preuve qu'il nous faut pour se débarrasser de Lex, une bonne fois pour toutes ?" La voix de Lois était enthousiaste et pleine d'appréhension, mais prudente; elle voulait que cela soit l'élément dont ils avaient besoin, mais elle savait aussi que toute tentative pour confondre Lex Luthor devait être à toute épreuve. Etait-ce le cas ?
Apparemment non. "Je ne pense pas, Lois. Pour être honnête, les dossiers ne nous en disent pas plus que ce que nous savions déjà. Ils ont confirmé que le projet de clonage était loin de créer un clone adulte pouvant vivre très longtemps à l'époque où il a soi-disant été arrêté par le même 'clone' censé avoir été créé par ce projet. Créer *n'importe* quelle sorte de clone adulte à cette époque-là -- ou plus tard -- nécessitait de l'ADN de grenouille, mais ça, nous le savions et rien dans les fichiers que le Dr Klein a décryptés n'ajoute ou ne modifie réellement tout cela.
"Ce qui signifie qu'il ne fait aucun doute qu'il n'y a *jamais* eu de clone. L'histoire de Luthor disant avoir été kidnappé et remplacé par son propre clone peu de temps après t'avoir demandé de l'épouser et avoir été emprisonné pendant presque trois ans, n'est juste -- qu'une histoire.
"Le Lex Luthor qui vit au dernier étage de l'immeuble de la LexCorp est le même homme que celui qui s'y trouvait il y a cinq ans, qui a essayé de me tuer et de t'épouser, qui s'est suicidé en sautant de cet immeuble, qui a été ressuscité par Gretchen Kelly, qui est allé en prison, qui t'a kidnappée lors de notre premier mariage... et qui sait que je suis Superman.
"Malheureusement, le fait de savoir n'est pas suffisant. Nous avons encore besoin de *preuves* que nous pourrons utiliser au tribunal et ces fichiers n'en sont pas."
"Oui," dit Lois, avec résignation. "Je vois ça d'ici. Ce serait un jour faste pour les avocats de Lex si nous essayions de l'exposer en utilisant ces fichiers comme preuves. D'abord, ils sont électroniques, et la justice est encore en train de débattre sur la question de savoir si les fichiers informatiques sont admissibles ou non -- trop faciles à éditer et tout le tralala..."
"Ajouté à cela que les gens qui ont obtenu ces 'preuves' sont connus pour avoir une dent contre Luthor -- ou son clone," poursuivit Clark. "Et peu importe que ce soit toi et moi, ou encore Alex et Nick, nous avons tous mis la main sur des informations étant la propriété de la LexCorp par des moyens douteux -- sans parler qu'Alex est un criminel condamné pour avoir piraté des systèmes informatiques. Ils pourraient tout descendre en flammes."
C'était décourageant, mais ils avaient toujours su que ce ne serait pas facile -- pas s'ils le faisaient comme cela devait être fait, de la *bonne* manière. Il pouvait être très facile de se débarrasser de Lex sans avoir à respecter la loi; le cauchemar de Lois quelques nuits plus tôt lui avait montré comme il était rapide et simple à Clark de le tuer. Il pouvait faire ça à des kilomètres de distance -- à des *centaines* de kilomètres! Mais s'ils prenaient la manière facile... ils allaient descendre aussi bas que Lex.
Les regards de Lois et Clark se croisèrent. Ils se regardèrent l'un l'autre avec amour et virent chacun cet amour leur revenir en retour. Ils s'avancèrent et se prirent les mains et, par ce geste, trouvèrent la force, comme ils l'avaient toujours trouvée depuis que chacun d'eux avait fait tomber ses barrières personnelles et découvert que cette force était prête à être donnée à la demande. Et avec cette force venait la détermination. D'accord, si cela devait être fait de la manière difficile, alors Lane et Kent *allaient* le faire de la manière difficile !
"Bien," dit Lois après quelques instants qui auraient pu durer longtemps ... ou une éternité. "Que *fait-on* pour prouver que Lex est, a été et sera toujours Lex, un monde sans fin, amen ?"
Clark rit. "Je ne crois pas 'qu'amen' soit le mot approprié, Lois -- mais je ne sais pas ce qu'ils disent à la fin d'une Messe Noire."
Lois rit aussi et ils partagèrent un autre moment de joie. Puis, ils se firent plus sérieux. "Ce dont nous avons besoin," dit Clark, "est ce dont nous avons toujours eu besoin : quelque chose qui nous permette d'avoir un échantillon d'ADN pouvant formellement et incontestablement être identifié comme provenant du 'clone'. Alors, quand il sera prouvé qu'il est identique à l'ADN de Luthor, nous posséderons une preuve réelle et inébranlable -- à moins qu'il ne déclare avoir un frère jumeau caché pendant toutes ces années. Le problème est, où peut-on trouver un échantillon d'ADN qui ne puisse venir que du clone et n'ait pas été altéré par les quatre ou cinq dernières années écoulées?"
"Hmmm... bonne question. Maintenant, la prochaine étape : que doit-on trouver pour avoir un échantillon d'ADN convenable ?" Lois avait déjà une bonne idée de la réponse, mais les deux journalistes utilisaient une technique qu'ils avaient développée au fil des ans, tout spécialement quand ils avaient à faire à quelque chose de "technique": l'un deux posait les questions, prenant un très grand soin dans la progression logique entre la question posée et la suivante; et l'autre, en général celui qui avait fait le plus de recherches sur le sujet, répondait aux questions, se creusant la tête si nécessaire pour couvrir toutes les possibilités. Ils trouvaient cela vraiment efficace, en général cela les mettait au moins sur une piste; c'était aussi quelque chose que les membres du personnel du Planet, même Perry White, se gardaient bien d'interrompre...
"Eh bien, la police a pris quelques échantillons de cellules à l'intérieur de la bouche," poursuivit Clark. "Mais on peut prendre n'importe quel tissu humain, à condition qu'il ait été préservé d'une quelconque manière depuis lors. Des cheveux peuvent faire l'affaire -- comme pour mon clone -- ou du sang ou encore un morceau de peau, si cela a été conservé dans un endroit très froid ou très sec, des tissus de muscles, encore une fois, s'ils ont été bien conservés; de la moelle... à peu près toutes les parties du corps, à l'exception peut-être des ongles coupés !"
"Vraiment ?" demanda Lois. "Bon pour le vaudou, mais pas pour les tests ADN ?" Devant l'acquiescement amusé de Clark, elle se terra dans le silence quelques instants. Finalement, elle jeta un œil à Clark et dit : "Et l'échantillon d'ADN prélevé par la police quand Lex a été arrêté ?"
"Je ne crois pas, chérie. Ils en ont pris un, c'est certain, mais si les empreintes digitales du 'clone' ont été trafiquées, tu veux parier que les résultats de l'ADN ont subi le même traitement?" Lois grimaça à cette réponse. "Ça vaut peut-être la peine de le vérifier quand même," dit Clark après une seconde ou deux, "parce que le dossier bidon -- s'il y en a un -- a dû être fait avec beaucoup de minutie. Il ne doit y avoir aucun doute qu'il s'agit de l'ADN de Luthor, mais il doit aussi montrer les signes de modifications génétiques nécessaires pour créer un clone. Il faudra trouver le juste milieu et nous pourrons peut-être démontrer que le dossier est faux. Mais je ne compte pas trop dessus."
"Oui, tu as raison... mais ça vaut la peine de s'en souvenir. D'accord, alors il n'y a pas d'échantillons officiels d'ADN. Le sang -- on peut trouver quelque chose avec du sang ?"
"Du sang serait parfait -- *si* nous pouvions trouver du sang et être certains qu'il provient du 'clone'. Et tout le problème est là."
"Oui... Où pourrait-on trouver quelque chose comme ça ? Je ne crois pas qu'il ait été assez aimable pour donner son sang -- qu'en penses-tu ?"
"J'en doute, mais on peut vérifier. Même s'il en a donné, les chances que son don soit encore dans les parages après cinq ans sont très minces. Nous aurions plus de chance en cherchant si Luthor garde une réserve privée en cas d'accident, mais il faudrait la découvrir et y pénétrer -- et ensuite trouver un moyen de s'assurer que notre échantillon a été pris à la même époque."
"C'est vrai... hé, et s'il y avait quelque chose dans les ruines du tunnel où il gardait ces 'corps de rechange' ? Il a dû perdre du sang là-bas."
"Aucune chance. J'ai vérifié avec le Dr Klein et l'ADN présent dans le sang se serait dégradé il y a longtemps et, même si on en trouvait -- ce tunnel a été comblé par la Municipalité pendant que tu étais à l'hôpital."
"Zut... ça aurait été une justice poétique, le voir confondu par son propre sang prélevé dans ces ruines. Où pourrait-on trouver un échantillon de sang... Je sais ! Le test de sang avant le mariage -- ça *doit* être celui du clone !"
Le couple s'assit, échangeant des regards pleins d'espoir... puis Lois se recala au fond du canapé. "Re-zut ! -- ils ne gardent pas les échantillons de sang après les avoir testés, tu te rappelles ? On s'en ait assuré avant *notre* mariage. Ils ne font pas non plus d'analyse ADN -- et même s'ils le faisaient, les rapports auraient pu être modifiés, de la même manière que les rapports de police l'ont été."
Clark lui sourit de manière rassurante. "C'était une bonne idée, chérie et ça vaudrait peut-être la peine de vérifier tout de même. On ne sait jamais..."
Lois sourit à son tour -- un sourire fatigué et frustré, mais tout de même un sourire. "D'accord," dit-elle, "le sang semble être un fiasco -- à moins d'avoir de la chance. Que pourrait-on chercher d'autre ?"
"Des cheveux serait probablement la chose la plus facile à trouver, si nous avions une raison de penser pouvoir en trouver. Je ne crois pas qu'il ait laissé traîner des échantillons de peau, de tissus ou encore de fluides organiques..."
Clark se tut, mais Lois ne le remarqua pas tout de suite car il avait dit un instant plus tôt quelque chose qui l'avait frappée. Quelque chose essayait de refaire surface dans ses souvenirs, mais cette chose n'avait toujours pas émergé, quand elle fut distraite en entendant son mari crier : "Attends une minute ! Des prélèvements de *tissus*..."
Lois revint de là où elle était et se remit à parler. "Quoi ? Clark, *quoi* ?"
Clark s'était déjà levé du canapé et regardait autour de lui dans la pièce. "Lois, où est cette liste de victimes des meurtres ?"
'Hmmm… ?' Ne sachant pas de quoi il retournait, mais certaine de la manière dont Clark agissait que ce devait être important, elle s'assit et répondit : "Il y en a une copie dans mon porte-documents -- il est en haut dans la chambre -- et il y a--" Il y eut un *whoosh* et Clark lui tendait le porte-documents avant même qu'elle n'ait pu terminer sa phrase : "-- une autre copie sur mon ordinateur..."
Lois fouilla dans le porte-documents, consciente de sa maladresse comme on l'est quand on est regardé par quelqu'un impatient que l'on sorte quelque chose en vitesse. Elle trouva enfin la liste et la donna à Clark. Il la lui prit doucement, la remercia et regarda la feuille intensément -- son expression ressemblait étrangement à celle qu'il avait quand il utilisait sa vision infrarouge, mais le papier ne s'enflamma pas -- puis, il la baissa et leva les yeux fixement.
Lois était sur des charbons ardents en observant son mari, mais elle ne disait rien, ne voulant pas interrompre ses pensées. Une éternité plus tard, du moins à ce qu'il parut, il murmura quelque chose qui ressemblait à, "C'est possible. C'est sans doute possible..." Lois résista héroïquement à l'impulsion de lui balancer quelque chose, sans parler de la curiosité qui la consumait, qui devait cependant se remarquer dans ses yeux, car Clark s'assit très vite à ses côtés et lui posa la liste sur les genoux.
"Regarde, chérie. Nous avons un total de 26 meurtres, exact ? Neuf des victimes que nous avons identifiées ont acheté, ou encore essayé d'acheter aux enchères des pièces de la collection Luthor après sa 'mort'; trois autres étaient actionnaires majoritaires dans des filiales de la LexCorp et leur mort a permis, comme par hasard, à Luthor de reprendre le contrôle des compagnies alors que les testaments étaient examinés et nous savons qu'il a tout de même racheté les parts de ces victimes.
"Ce qu'on n'a pas réussi à faire est de relier ces douze victimes et les autres, parce qu'elles n'avaient de lien avec aucune des autres victimes ni aucune des anciennes propriétés de Luthor -- la plupart d'entre elles ne pouvaient pas se le permettre !
"Et si on s'était trompés sur toute la ligne? Et si Luthor lui-même est le lien, plutôt que ce qu'il possède ou a possédé ?" Il montra quelques noms de la liste. "Regarde quelle était la profession de ces types : Smith était technicien de laboratoire au quartier général de la police; Andersen était un pathologiste qui travaillait pour le bureau du Procureur; ces deux-là travaillaient à l'Hôpital Général, l'un dans les bureaux et l'autre comme infirmière; celui-ci était un célèbre coiffeur pour homme !"
Un fois encore, Lois sentit qu'il y avait quelque chose dont elle devait se rappeler, mais avant qu'elle puisse se concentrer, Clark poursuivit : "Tu vois, chérie ? Si j'ai raison, alors ces... cinq, sept... *dix* victimes ont été tuées parce qu'elles avaient été en contact avec l'ADN de Luthor ou encore avec les rapports qui en parlaient !"
Lois comprit. Et ça avait du sens. Ça n'aurait pas dérangé Lex de commettre quelques meurtres de plus s'ils avaient pu couvrir ses traces; faire les choses à fond, c'était bien Lex. Mais ça laissait toujours...
"Et ces quatre-là, Clark ?" demanda-t-elle, en indiquant un groupe de noms au bas de la liste. Les quatre victimes avaient été récemment ajoutées et semblaient avoir encore moins de choses en commun qu'avec le reste de la liste, si l'on tenait compte de ce que Clark venait de dire.
Clark hocha la tête. "Là tu me coinces, chérie. Je ne vois pas comment un astronome, un électricien, un physicien et un technicien en optique collent dans le scénario, même si deux d'entre eux travaillaient pour Luthor. Mais je crois quand même que les autres noms sont liés; nous trouverons peut-être le lien entre ces types quand nous aurons un peu plus avancé.
"Et nous *allons* avancer; je sens que les pièces du puzzle commencent à s'assembler..."
Lois acquiesça; elle pensait la même chose -- un léger picotement dans la nuque lui indiquait qu'un article était sur le point d'exploser. Ce que n'avait pas dit Clark, mais que tous deux savaient pertinemment, était que lorsque les choses commençaient à s'assembler de cette façon, c'était également là que cela devenait plus dangereux...

Lindy Barrows déconnecta son téléphone cellulaire de l'ordinateur portable qu'elle venait juste d'acquérir et les rangea dans son sac de voyage avant de se diriger vers le guichet de la LexCorp Voyages. Comme promis, M. Luthor lui avait envoyé un message l'informant qu'Owen Preece, ou du moins l'argent qu'il avait pris de la BIL, n'avait pas été retrouvé en Ohio, mais dans une petite ville non loin de Decatur, Illinois. Il ne lui avait pas fallu longtemps pour organiser son vol vers Springfield -- dans un jet de la compagnie, ni plus ni moins -- mais ce n'était pas surprenant; la LexCorp demandait l'efficacité maximale de tout son personnel et, recevoir des ordres de l'Homme avait rendu les employés encore plus empressés à accomplir les formalités pour son départ.
Lindy ne savait pas exactement comment son patron avait retrouvé la trace des billets, mais elle avait tout de même quelques idées. Cela avait sûrement quelque chose à voir avec le nouveau système LexTrace, et, si c'était le cas, les possibilités de ce système étaient plus efficaces que celles que l'on connaissait -- ce qui était difficilement surprenant. D'après les termes de l'e-mail qu'elle avait reçu, elle supposait qu'il devait y avoir un moyen de localiser l'argent marqué en temps réel et pas en attendant qu'une banque perdue au milieu de nulle part détecte un billet marqué et le signale. Peut-être que la teinture émettait une sorte de radiation pouvant être captée par des satellites ? De toute manière, peu importait la façon de retrouver leur trace, cela rendait certainement la vie de Lindy plus facile puisqu'elle savait presque exactement où se trouvait sa proie -- et l'autre petit gadget qu'elle avait dans sa valise allait également l'aider.

"Voyons, voyons, voyons... Regarde un peu qui est mal vu du méchant Lex... Je savais que pirater son adresse e-mail était une bonne idée !"
"Quoi *encore*, Alex ?" murmura un Nick ennuyé, juste assez fort pour être entendu.
"Tu te rappelles Owen Preece, l'ancien patron de Chris ? Il semblerait qu'il ait pris la poudre d'escampette avec trois cents mille dollars en espèces appartenant à la compagnie, et Luthor n'est pas vraiment ravi."
"'Pris la poudre d'escampette', Alex ? As-tu encore regardé la chaîne PBS ? Et alors ? Pourquoi tu t'intéresses à lui ?"
"Bien sûr que j'ai regardé PBS; c'est de là que viennent mes meilleures idées." 'Y compris une idée qui sera le dernier clou sur le cercueil de la LexCorp.' "Pourquoi je m'intéresse à lui ? *Tu* ne trouves pas intéressant que, tout de suite après que le type qui a tué Chris soit arrêté -- mais *pas* pour le meurtre de Chris -- le directeur de LexCorp Informatique vole 300 000 dollars et prenne la fuite ? Avec le nouveau limier de service de Luthor, une certaine Lindy Barrows, sur ses talons ?
"Viens ici et jette un oeil à cette Mlle Barrows, alias 'Lindsey Bailey'. J'ai réussi à trouver une photo d'elle dans les archives de la police quand j'ai arrangé les dossiers du coroner concernant 'nos' corps. Elle a été arrêtée à peu près en même temps que nous sommes 'morts', pour présomption de complicité dans le meurtre de Chris et entrée avec effraction -- dans *mon* appartement !"
Ceci attira l'attention de Nick. Il hocha la tête pour s'éclaircir les idées en se levant du sofa pour jeter un coup d'œil à l'écran par-dessus l'épaule de son frère. "Bon sang, Alex," jura-t-il, en regardant la photo, "Ça pourrait être la femme qui était avec O'Reilly..."
"C'est aussi ce que j'ai *pensé* !" répondit Alex, triomphalement. "Je suis prêt à parier que c'est elle. Jette un œil à ça." Il fit apparaître à l'écran le mail de Luthor que Lindy avait lu à l'aéroport. Nick le lut, les yeux écarquillés en absorbant l'importance de ce message. "Réfléchis, Nicky. Nous avons une femme qui farfouillait dans mon appart après que l'on ait simulé notre mort; elle ressemble à la femme que tu as vue avec O'Reilly quand il a tué Chris; et notre méchant Lex lui donne des ordres comme *ça* ! À moins qu'il n'ait une équipe complète de tueurs à gages féminins qui lui obéissent au doigt et à l'œil , je prends le pari qu'elle est la complice d'O'Reilly. *Et* qu'ils sont tous les deux coupables d'avoir tué Chris."
Nick fixa la photo sur l'écran, horrifié. "Qu'est-ce qu'elle fait dehors ? Pourquoi n'est-elle pas bouclée si les policiers l'ont arrêtée ?"
"Qu'en penses-tu ? Luthor, bien sûr ! Il lui a fourni un brillant avocat, l'avocat lui a dit ce qu'elle devait dire et elle était libre quelques heures plus tard."
Nick se jeta dans le sofa. Le silence régna un instant dans la pièce, jusqu'à ce qu'il demande, hésitant, "On ne peut pas faire quelque chose ?"
"Que veux-tu que nous fassions ? On est censés être *morts*, tu te rappelles ? C'est ce qui va nous arriver pour de vrai si notre petite Lindy, ici présente pose les yeux sur nous !"
Nick ne pouvait pas dire le contraire, et ça ne le réjouissait pas.
"Écoute, Nicky, Preece va devoir prendre des risques *un peu* plus longtemps," dit Alex. Il leva la main et approcha son pouce et son index à un centimètre l'un de l'autre. "On est *à ça* de démolir l'empire de Luthor. Si Preece peut rester caché encore quelques jours, il n'aura plus à s'en faire; notre méchant Lex va devoir se débattre avec de plus gros problèmes que ce type qui s'est envolé avec 300 mille dollars."
"Mais ce n'est pas de Luthor dont ce type doit s'inquiéter ! Si Luthor est dans le pétrin, penses-tu qu'il va se soucier de rappeler ses chiens ? Allons, Alex, on ne peut pas ignorer ça. De toute façon, combien tu paries que Preece sait quelque chose à propos de la mort de Chris ? C'est probablement lui qui a chargé Chris de protéger ces satanés fichiers ! Ce qui veut dire qu'il est en fuite pour la même raison que nous; on doit l'aider...
"Et si on en parlait à ces deux journalistes ? Ils en savent autant que nous -- même plus, probablement -- sur la mort de Chris et ils nous ont laissés partir. Peut-être qu'ils peuvent l'aider."
Alex réfléchit. "D'accord..." dit-il finalement. "Oui, d'accord." Ses doigts commencèrent à voler sur le clavier. Un instant après, il se cala sur sa chaise avec un sourire satisfait. "Voilà, Nicky; un e-mail codé qui ne peut être dépisté a été envoyé à Lane et Kent, avec une copie de tout ce que Luthor a dit à sa charmante Mlle Barrows et un message leur demandant de faire tout ce qu'ils peuvent pour retrouver Preece. C'est tout ce qu'on *peut* faire et nous l'avons fait. Et maintenant, si on dînait ?"
"D'accord," accepta un Nick quelque peu soulagé. C'était à son tour de préparer à manger, il se dirigea donc vers la cuisine. Derrière lui, Alex soupira avec soulagement, ferma la fenêtre du courrier électronique et ouvrit un nouveau fichier à éditer. PBS lui avait en effet donné une idée, une idée d'une si grande envergure qu'elle en était presque sublime par son audace et il ne pouvait attendre de commencer sa création. L'ordinateur lui demanda le nom qu'il voulait donner au fichier et il arrêta de taper, restant sans bouger en y réfléchissant. Enfin, un sourire de requin se dessina sur son visage, tandis qu'il entrait le nom du fichier -- le seul nom possible pour *ce* fichier, vraiment.
ASSASSINLC.
FIN DE LA PREMIERE PARTIE

Les personnages de cet épisode sont la propriété de DC Comics, December 3rd Production et Warner Brothers. Aucun non respect des droits n'est délibéré de la part de l'auteur ou du Season 6 group, toutefois, les idées exprimées dans cet épisode sont la propriété des auteurs © 1999.
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