La dernière fois que j'ai vu Elvis - 2 de 2 |
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Saison 6, Episode 4
Deuxième partieÉcrit par CC Malo
Édité par Laurie Farber et Lynda LoveVersion française de Traduction Chantal MartineauPendant que Lois était dans le métro, Superman survolait l'Océan Atlantique à la recherche des survivants d'un cargo qui avait essuyé une tempête en Nouvelle-Angleterre. Battant pavillon étranger et en moins bon état de naviguer qu'il n'aurait dû l'être, le cargo avait pris plus d'eau que ses pompes ne pouvaient en évacuer et il tanguait comme une coquille de noix sur les vagues impitoyables de l'Atlantique gris et glacé. Les signaux de détresse du navire avaient été reçus par les garde-côtes américains, mais les conditions climatiques étaient trop difficiles pour envoyer des bateaux de secours. Clark avait entendu l'information à CNN, sa diffusion faisant toujours partie du bruit de fond de la salle de rédaction du Planet. Atteignant le secteur dans lequel devait se trouver le cargo, Superman concentra sa super oreille pour entendre les plus hautes fréquences de la radio du bateau, se servant de ses tympans comme radar. Il localisa le navire juste au moment où il allait couler. Il tournoya au dessus du pont et le balaya du regard, cherchant des signes de vie, puis il regarda s'il y avait des canots de sauvetage aux alentours. Il semblait qu'aucun canot n'avait été mis à la mer; la mer était trop mauvaise pour larguer un canot de sauvetage et espérer survivre aux vagues hautes de plusieurs mètres qui balayaient l'Atlantique. Atterrissant rapidement sur le pont afin que sa présence soit clairement visible, Superman courut jusqu'à la passerelle du capitaine. "Avertissez votre équipage. Je vais aller sous le bateau et le lever suffisamment pour le mettre en sécurité." Il plongea dans l'océan, point rouge se battant contre l'écume blanche des vagues déchaînées, telle une torpille se dirigeant vers sa cible. Se positionnant sous le centre de gravité de la coque massive du navire et balançant son gigantesque poids avec précaution, ses bras puissants soulevèrent le cargo pour qu'il se trouve au-dessus des vagues. Alors que le bateau se détachait de la mer, l'eau salée sortait par les trous de la coque. Conscient que voler à une vitesse supersonique avec le navire délabré serait dangereux pour l'équipage, Superman prit garde de ne pas aller plus vite que la vitesse normale du bateau. Tandis qu'il volait avec son cargo, Clark fut frappé par la majesté effrayante de l'océan déchaîné. Tandis que Lois était au premier en train d'allaiter Laura, Martha sortait des étagères les ingrédients pour les muffins qu'elle voulait préparer, espérant que cette activité soit un remède à l'énergie qui agitait son corps comme celui d'un chat avant un orage. Ce n'était pas à cause de Jonathan. Hier, ils avaient parlé de leur passé et Martha avait rassuré son mari qu'elle et Cliff n'avaient jamais été amants, que Jonathan n'avait jamais été son second choix, mais bel et bien son premier. Bien sûr, il le savait. Son bon sens habituel était revenu et ils avaient passé une merveilleuse journée ensemble, explorant des quartiers de Métropolis comme des enfants le feraient par un jour de congé inattendu. Elle soupira avec plaisir à ce souvenir, alors qu'elle mesurait la quantité de farine dont elle avait besoin, la mettant ensuite dans un grand saladier. Cependant, d'une certaine manière, Jonathan posait encore un problème ou peut-être était-ce elle. Même si elle lui avait avoué qu'elle avait vu Cliff l'autre jour, elle n'avait pas raconté toute l'histoire à Jonathan parce qu'elle avait peur qu'il la presse d'aller à la police et elle n'était pas certaine de vouloir le faire. Jonathan se butait toujours quand il croyait que quelque chose constituait une menace pour sa famille. Dans le passé, cette attitude l'avait amusée ou lui avait encore donné, à elle aussi, cette force dont elle avait souvent besoin. Maintenant, elle allait peut-être l'empêcher de faire ce qui était bien. C'était là son dilemme; devait-elle aller à la police ? Elle savait qu'elle ne pouvait pas trahir un ami avec lequel elle avait vécu tant d'expériences, même si ces expériences étaient lointaines. Certaines choses vous restent pour toujours; certaines personnes vous restent pour toujours. Cliff avait été très clair l'autre jour quand ils s'étaient disputés. Il ne voulait pas qu'on le trouve. C'était trop dangereux pour lui. Sa superbe voix s'était endurcie et était devenue aussi tranchante que le métal, il l'avait insultée, l'accusant de vouloir le donner. Elle se rappelait ses mots blessants. "Retourne à ton fermier, Martha. A ta cuisine spacieuse, à tes 2,4 enfants et à tes tartes aux pommes." Elle aurait pu le dénoncer rien que pour ça, pensa-t-elle. A vrai dire, elle avait explosé quand il avait dit cela, lui criant qu'il était facile pour lui de se retirer pour faire sa petite révolution, qu'il ne savait rien de la vraie responsabilité, de la force et de la compassion de Jonathan Kent. Ils s'étaient quittés fâchés. Peut-être qu'elle pourrait en discuter avec Clark et Lois. Peut-être. Si elle le faisait, n'allait-elle pas sous-entendre qu'elle allait suivre leurs conseils ? Clark allait s'inquiéter de sa sécurité et devenir aussi protecteur envers elle que son père. Dernièrement, il lui semblait que Clark le devenait de plus en plus. Il allait lui conseiller d'aller à la police, à moins qu'elle ne commence par dire qu'elle n'irait pas à la police, mais si ce n'était pas le cas, alors pourquoi voulait-elle en parler ? Je commence à ressembler à Lois, pensa-t-elle. Sa décision étant prise, elle pétrit la pâte à muffins à une vitesse démontrant des années d'expérience et grimpa l'escalier vers la chambre du bébé. "Vous avez une minute, ma chérie? J'aimerais vous parler de quelque chose." "Bien sûr, Martha." Lois jeta un oeil à l'enfant qui tétait et sourit. "Je crois que j'en ai pour plusieurs minutes." Le visage de Martha était sérieux. "Tout d'abord, je veux que vous me promettiez, Lois, que vous ne parlerez de ça ni à Clark ni à Jonathan. Peut-être que je me déciderai à leur dire, mais la décision me revient. Vous devez aussi savoir qu'il s'agit peut-être de quelque chose d'illégal." Lois reconnut la fermeté dans la voix de sa belle-mère et acquiesça. "C'est promis, Martha." Martha soupira et s'assit dans la vieille chaise en osier face à Lois, incertaine de la manière de commencer. Lois lui facilita la tâche. "C'était bien vous que Bentley a vu et que j'ai vu le jour suivant, n'est-ce pas, Martha ? Qui était l'homme avec lequel vous vous disputiez ? Est-ce lui qui a dessiné votre portrait ?" "Oui. Je l'ai rencontré au printemps. Son nom est Cliff. Clifford Moran. Oh mon Dieu, c'était en 1961." Martha semblait atterrée. "Jonathan voulait m'épouser. Lois, j'étais si jeune. Jonathan avait trois ans de plus que moi. Vous savez, il a été le premier homme que j'aie jamais embrassé." Elle sourit à ce souvenir. "C'était avant qu'il n'entre à l'armée. Je l'avais rencontré à peine un mois avant qu'il ne parte pour l'Asie, ça faisait partie de ses deux ans de service militaire. Quand il est revenu, il était prêt à s'installer, mais je n'en étais pas aussi sûre. Pour en revenir à mon histoire, il me demanda en mariage l'automne même, puis plus tard en hiver et encore au début du printemps." "Entre les labours des champs." Lois se rappela l'histoire de Martha trois ans auparavant. Martha se mit à rire. "Oui. Je commençais à ressentir tellement de pression. Mes parents croyaient qu'il était du tonnerre. Et, bien sûr, il l'était. C'était ce qui rendait la situation si difficile. Je croyais que j'étais amoureuse de lui, mais… j'étais persuadée qu'il y avait autre chose dans le monde que Smallville et je voulais le découvrir. Quand j'ai vu la description du programme d'études de l'art de l'état du Kansas, je savais que je devais y aller. J'ai adoré ! Se perdre dans la chose que l'on essaie de créer ! Et toutes les discussions et les disputes que nous avons eues !" "Etiez-vous amoureuse de Cliff ?" La voix de Lois était douce en posant la question, ses yeux sympathisaient tandis qu'elle écoutait Martha parler de sa jeunesse. "Dans un certain sens. J'étais amoureuse de tout. Je suis sortie quelques fois avec Cliff, mais nous traînions ensemble plus qu'autre chose." "Etait-ce l'ami pour lequel vous avez attaqué le flic ?" "Oui." Martha rit de nouveau à ce souvenir. "Cliff était tellement idéaliste, il n'était pas prêt à faire des compromis avec le système. J'admirais cela. Il était très passionné pour tout ce qu'il croyait être juste. Et persuasif en plus. Au cours des cinq mois pendant lesquels je l'ai fréquenté, plus il s'impliquait dans son groupe plus il devenait radical." "Et vous ?" "Oh, mon idéalisme était très pragmatique." Martha rit et ses yeux étincelèrent un instant. "Et pour vous dire la vérité, Jonathan me manquait, même si c'était un peu humiliant qu'il vienne me voir en prison. Je lui ai écrit de ne pas venir, mais ça n'a pas marché." "Martha, j'aurais voulu voir ça." "Ma chérie, je suis très contente que vous ne l'ayez pas vu." "Alors, qu'est devenu Cliff ?" "Il est mort. Dans le bureau d'un shérif en Alabama après avoir été accusé de meurtre quand il a tiré sur un policier en s'enfuyant à la suite d'un vol dans une banque." "Oh, non." Lois était stupéfaite. "Martha !" "Je croyais qu'il était mort, Lois, jusqu'à mardi dernier. Vous savez, c'est soit lui soit l'homme avec qui il était qui ont volé le portefeuille de Jonathan. Au tout début, je ne l'ai pas reconnu. Il est tellement plus vieux et il a les cheveux gris. Disons que je suis un peu plus âgée moi aussi. De toute manière, c'est lui qui l'a retourné. Je me suis informée auprès des voisins. Mme Sarrazin l'a aperçu." "Et vous avez décidé de partir à sa recherche. C'est très bien, Martha." "Merci, ma chérie. Cependant Cliff ne voulait pas qu'on le trouve. Le croquis était accompagné d'un mot qui me demandait d'arrêter mes recherches." "Mais vous ne pouviez pas faire ça." "Bien sûr que non. Quand vous nous avez vus le jour suivant, il m'a dit qu'il devait rester caché. Il n'a aucunement l'intention de faire face aux accusations de meurtre qu'on lui reproche. Au fait, il n'a pas tiré sur ce policier, Lois." "C'est lui l'homme impliqué dans l'attentat à la bombe que la police recherche, n'est-ce pas, Martha ?" "Oui." Elle regarda Lois et attendit. "Pourquoi ne voulez-vous pas aller à la police ?" "Je crois qu'il est innocent, Lois. Et aussi parce que je veux lui parler à nouveau pour en être absolument certaine." "Ça veut dire que l'on doit le retrouver. Et nous devons trouver qui a posé les deux bombes." Lois était décidée. Satisfaite, Martha émit une suggestion. "Une de ses vieilles toiles est en vente dans une galerie d'art de l'Annexe. Je n'ai rien tiré du propriétaire, mais ça vaut la peine d'essayer encore." "Et ces gens qui occupent les vieux appartements Daly. La première chose à faire demain." Lois baissa les yeux vers Laura, qui s'était endormie dans les bras de sa mère. "Mais, pour le moment, il est l'heure de te mettre au lit, mon trésor." Superman survolait les résidences d'Hypérion, en observant le sol, cherchant les signes que quelqu'un pourrait voir atterrir un extra-terrestre dans la courette de Lois et Clark Kent. Tout était clair, alors il se dirigea vers le sol, dérivant dans le ciel sombre entre les grands arbres toujours verts et la clôture qui séparait les propriétés, puis il ouvrit la porte de derrière pour entrer dans sa cuisine douillette. Un rapide tourbillon et il se retrouva vêtu du costume bleu foncé dans lequel il avait commencé la journée. Mais pas pour longtemps. La veste et la cravate furent enlevés en un instant, jetés sur une chaise de cuisine, alors qu'il se dirigeait vers le salon où son père était assis seul, lisant un livre, la télévision reléguée au second plan. "Vous allez bien Maman et toi, Papa ?" Clark s'arrêta un instant au pied de l'escalier. "Bien sûr, fiston, nous avons passé une merveilleuse journée hier. Nous avons parlé de choses et d'autres. Je sais que quoi qu'il se soit passé entre elle et Cliff ce n'était pas sérieux." Il sourit à son fils. "C'est fou, non ? Nous sommes mariés depuis plus de trente ans et je connais les sentiments de ta mère. Mais je ne peux m'empêcher de penser à lui sans avoir le même ressentiment qu'à cette époque." "Ce n'est pas si fou, Papa. De temps à autre, je rencontre Dan Scardino." L'expression de Clark était amère. "Je n'aime pas ce type." Jonathan se mit à rire, puis son expression devint plus songeuse. "Ta mère me cache encore quelque chose, par contre." "Ça ne t'inquiète pas ?" Clark savait que son inquiétude était enfantine, mais il y avait une partie de lui qui ne se sentait pas à l'aise quand quelque chose accrochait entre ses parents. "Un peu, parce que je sais qu'elle est inquiète. Mais elle m'en parlera quand elle sera prête." Clark sourit à son père. "Tu la connais comme ta poche ?" "Presque. Elle arrive encore parfois à me surprendre." Peu après une heure le mercredi matin, l'immeuble Daly prit feu, des flammes venimeuses s'échappant par des fenêtres brisées illuminant le ciel sans lune. Le bâtiment se consumait rapidement, des fouets orangés sortaient des planchers pourris jusqu'aux boiseries craquées des vieux murs de plâtre. Le pire était la fumée qui s'en dégageait et montait dans les couloirs, se glissant sous les portes. Les résidents du bâtiment attrapèrent les quelques affaires qu'ils possédaient et coururent vers le froid mordant de l'extérieur. Ils se regroupèrent vérifiant leur nombre, de peur que quelqu'un ne soit encore dans le bâtiment. Les pompiers mettaient une éternité à arriver et certains d'entre eux se demandaient si le service des incendies de Métropolis ne répondait tout simplement pas aux appels au feu des bâtiments délabrés. Ils avaient tort. Ils arrivèrent, même si Superman était là le premier, sa cape rouge ondulante se fondant dans les flammes, tandis qu'il courait à l'intérieur du bâtiment pour secourir deux personnes qui étaient prises au piège derrière un mur effondré. Comment savait-il où il devait les trouver ? Sa voix était très calme en leur demandant s'il était possible qu'il y ait encore des gens à l'intérieur. Oui, peut-être. Le vieux Mick ne les avait-il pas rejoints ce soir, à moitié ivre et perdu dans un vieux désir de vengeance ? Superman retourna dans le bâtiment et ils le virent ressortir, portant l'homme dans ses bras vers l'ambulance qui avait accompagné les camions d'incendie. Puis Superman s'en alla, laissant les pompiers de Métropolis faire leur travail. Clark raconta l'incendie à Lois le lendemain matin, pendant qu'ils s'habillaient pour aller travailler. "Oh, non, Clark. Est-ce que tout le monde va bien ?" "Je l'espère. Ils sont tous sortis de l'incendie sains et saufs, mais qui sait où ces gens ont passé le reste de la nuit." "Peut-être devrait-on chercher la réponse ce matin. As-tu une idée de ce qui a pu provoquer l'incendie ?" "Non et ça m'inquiète. Il y a eu quelques feux inexpliqués dans ce secteur. Celui de Noël, pendant la réception du Planet, que je n'ai toujours pas résolu. Je sais que le service des incendies a qualifié ce feu "d'accidentel", mais il me semble que quelque chose cloche." Il lui lança un regard troublé en disant cela. "De toute façon, je n'ai pas pu trouver quelque chose d'assez évident pour expliquer l'incendie d'hier soir et c'est pour ça que je suis parti dès que j'ai été sûr que tout le monde allait bien." Il s'arrêta de boutonner sa chemise et jeta un regard vers elle. "Tout ce à quoi j'aspirais était de retourner me coucher." "Je ne me souviens pas que tu sois revenu." "Je sais." Il se mit à rire. "La première fois que je suis revenu hier soir, ma fille dormait. La seconde fois, c'était ma femme." Lois lui tapota la poitrine. "Mais nous avons eu un superbe week-end." Il se pencha pour l'embrasser. "Oui. Je suppose que ce souvenir devra nous suivre jusqu'au prochain week-end." Lois appela l'inspecteur Henderson au poste de police de Métropolis dès qu'ils arrivèrent au journal. "Avez-vous des nouvelles informations sur l'attentat à la bombe chez Bronson ?" "Ne trouvez-vous pas l'histoire un peu dépassée, Lane ?" "Je suppose que ça veut dire que vous êtes dans une impasse." "Nous allons le coffrer. C'est une simple question de temps." "Vous avez des soupçons sur d'autres poseurs de bombes éventuels ?" "Pas de raison d'en avoir. Pourquoi, vous savez quelque chose ?" "Non, j'ai simplement supposé qu'avec si peu de preuves, vous n'alliez pas vous arrêter à un seul suspect. Vous savez, il faut rester ouvert." Le ton de sa voix semblait à la fois innocent et obligeant. La voix d'Henderson était sardonique. "Merci de votre aide, Lane. Nous apprécions toujours l'objectivité de la presse. Maintenant, si vous en avez terminé avec moi, j'aimerais bien retourner à ma paperasse. Je dois vérifier la grammaire et la ponctuation avant de rendre mon rapport." Lois sourit à ce sarcasme en raccrochant le combiné. Elle adorait Henderson. Dirigeant son regard vers Clark, elle lui demanda : "As-tu trouvé quelque chose sur l'incendie ?" "Pas grand-chose. Le service des incendies de Métropolis est encore en train d'examiner la scène pour voir s'il s'agit d'un accident. Avec ces barils de pétrole ouverts et le vieux bâtiment, il était temps." "C'est une chance que Superman soit passé par là." "Une vraie chance." Puis il dit en se levant : "Allez, Mme Lane. Allons faire quelques recherches. Je ne suis pas convaincu que ce soit accidentel. C'est un peu trop facile." Peu de temps après, ils se tenaient face aux ruines de briques fumantes qui avaient jadis été les appartements Daly. L'eau utilisée pour éteindre le feu avait recouvert le bâtiment de grands stalactites posant un problème de sécurité pour quiconque passerait dessous. Quelques employés du service des incendies ratissaient au peigne fin les décombres à la recherche de preuves pouvant indiquer l'origine du sinistre; toutefois, un rapide entretien avec eux démontra qu'ils n'avaient pas trouvé grand-chose et qu'ils ne s'attendaient pas à trouver autre chose. Cet incendie semblait très ordinaire. La prochaine étape était de traquer quelques-unes des personnes qui s'étaient trouvées là la veille. Il leur fallut un certain temps; ils s'étaient dispersés, cherchant la chaleur là où ils pouvaient la trouver. Personne n'était vraiment enclin à parler à des journalistes. Lois et Clark sentirent ce vif sentiment de méfiance à travers plusieurs personnes auxquelles ils parlèrent. Quelques-unes semblaient tout simplement désorientées, incertaines des événements liés à l'incendie. Une personne clama fermement qu'une voix extra-terrestre l'avait avertie que le danger était tout près. Pour une raison quelconque, il n'arrêtait pas de saluer Clark. Certains des jeunes à qui ils avaient parlé avaient peur. Ils étaient renfermés, leur visage tournant au blanc alors que les deux journalistes tentaient de leur soutirer des informations.
"Je sais et j'ai froid." Lois sautilla sur place dans l'espoir de se réchauffer. Levant ses lunettes, Clark lança un rapide éclair de chaleur vers ses bottes. "Ça va mieux ?" "Merci." Elle sourit et entoura son bras autour du sien. "Retournons au Planet, homme de l'espace."
Clifford Moran avait peur, pas pour lui, mais pour les autres. Les journaux avaient déclaré que l'incendie était accidentel, étant donné les conditions de vie des squatters. Il savait que c'était faux; ils avaient fait attention. Ayant grandi avec un père et un frère qui faisaient du camping en plein hiver, il en connaissait beaucoup sur la survie en extérieur. Il en savait aussi beaucoup sur le camping dans les bâtiments abandonnés. Il comprenait aussi trop bien que certaines des personnes du groupe soient d'anciens patients instables qui avaient été relâchés des hôpitaux psychiatriques de l'Etat en raison des coupures budgétaires. Il savait qui étaient ces gens et il avait tout fait pour qu'ils se retrouvent avec d'autres personnes qui soient à la fois expérimentées et qui puissent s'occuper d'eux pour que chacun contribue à l'épanouissement du groupe. Même s'il avait fait cela souvent au cours des trente dernières années, il ressentait encore de la satisfaction en voyant la fierté dans les yeux de ses amis quand ils apprenaient à construire un abri. Il était impossible que le feu ait été causé par négligence. Qui que soient ceux qui avaient orchestré les attentats à la bombe, ils devaient aussi être responsables de l'incendie. Peu importe qui ils étaient, ils allaient encore frapper. Et il était convaincu que les sans-abri étaient les cibles. Cliff pensa qu'il allait avoir besoin d'aide, mais qu'il ne pouvait pas se rendre à la police. Il n'y avait pas de limites à ce que pouvait amener une accusation de meurtre et, maintenant, ils le recherchaient au sujet des attentats à la bombe. Il ne pouvait pas non plus s'offrir d'avocat. Il allait être avalé par le système, on allait le faire passer devant la Cour, puis il serait déclaré coupable et condamné à passer le reste de ses jours en prison, dans un système carcéral envahi par la drogue, le HIV et l'hépatite C. Il décida alors de porter un grand coup. Il avait téléphoné à Martha Kent. Quand il avait découvert que le portefeuille que Billy et lui avaient volé appartenait à Jonathan Kent, cela ne lui avait rien dit jusqu'à ce qu'il fouille son contenu et y découvre une petite photo prise lors du mariage de son propriétaire. Cliff avait immédiatement reconnu Martha Clark, confirmant ce flash qu'il avait eu devant le cinéma. Un autre papier signalait que Martha et son fils, Clark, vivaient ici à Métropolis. Il avait été frappé. Clark Kent était journaliste au Daily Planet. Avide lecteur de journaux, Cliff trouvait depuis longtemps que Clark Kent et sa partenaire, Lois Lane, étaient très crédibles. Sous sa seule signature, Kent avait récemment écrit quelques articles sur les enfants de la rue que Cliff avait appréciés. Peut-être que l'on pouvait faire confiance à Kent. Cliff appela donc Martha et lui demanda d'arranger un rendez-vous pour rencontrer son fils. Martha fut surprise quand son interlocuteur s'identifia comme étant Clifford Moran. Elle se dit que certaines conversations téléphoniques pouvaient parfois être absurdes, quand il lui demanda comment elle allait. "Que veux-tu, Cliff ?" "J'ai besoin d'aide, Martha et je te fais confiance. J'espère que je peux aussi faire confiance à ton fils et que lui et sa partenaire seront peut-être intéressés. Pourrais-tu m'arranger un rendez-vous avec lui ? "Oui. Quand et où ?" "A la Galerie Fringe. Dans une heure." "Ce ne sera peut-être pas possible. Ils sont peut-être déjà sortis pour un article." "Tu peux laisser un message pour moi à la galerie. Je serai là dès qu'ils pourront venir." Quand Lois et Clark revinrent au Planet après une matinée peu concluante à essayer de suivre une enquête plutôt vague, Lois releva ses messages vocaux et trouva l'histoire qui s'offrait à eux. Elle écouta la voix calme de Martha. "Lois, un de mes vieux amis m'a appelé. C'est un admirateur de votre travail et de celui de Clark et il se demandait s'il pouvait vous rencontrer, disons pour le déjeuner ?" Les yeux de Lois s'écarquillèrent en écoutant le bref message de Martha. Immédiatement, elle composa le numéro de son domicile et parla à Martha. Trop excitée pour s'identifier, elle dit : "Est-ce que vous voulez parler de la personne à laquelle je pense ?" "Oui. Il a appelé il y a environ deux heures. Vous pourrez y être ?" "Bien sûr. Vous voulez venir aussi ?" "Vous plaisantez, ma chérie ? Je ne voudrais pas manquer ça. J'ai décidé de tout raconter à Jonathan et il m'a dit qu'il va se débrouiller avec Laura. C'est une bonne chose qu'il ait déjà une grande expérience pour changer les couches." Lois sourit en entendant sa belle-mère s'esclaffer. Puis, Martha poursuivit. "Mais il n'est pas ravi que j'y aille, même s'il comprend. Et il préfère que Clark et vous soyez là." "On se retrouve où ?" Martha lui donna les détails. "Clark," Lois parcourut la courte distance qui séparait leurs deux bureaux. "On sort." "Vraiment ?" Elle était déjà au vestiaire en train de mettre son manteau. "Je te raconterai tout en chemin." Et Lois lui raconta tout. "Je n'arrive pas à le croire, Lois. Qu'est-ce que fait ma mère à fréquenter un anarchiste qui pose des bombes ?" Ils sortaient du hall principal du Planet. "Clark, c'est très exagéré." "Tu as eu une mauvaise influence sur elle, tu sais ?" "Je n'étais même pas née en 1961, Kent. Essaie autre chose." "On a intérêt à être là-bas avant que Maman n'arrive. Que dirais-tu si on, euh," il lui fit leur petit signe d'envol. Lois leva les yeux au ciel. "Je ne crois pas que Martha soit en danger, Clark." "Très bien. Prends un taxi et je vais voler." Il se dirigea rapidement vers une ruelle adjacente, réapparaissant dans son costume, vola vers l'endroit où Lois se tenait, la souleva dans ses bras, lui lança son regard sous-entendu, 'Je m'en occupe' et atterrit quelques secondes plus tard dans une ruelle sale, pleine de poubelles. "Bien, allons chercher ce type avant que Maman n'arrive." Lois donna un coup de pied dans une boîte de conserve rouillée et le suivit sous le soleil. Clark s'arrêta un instant, regardant à gauche et à droite tout le long de la rue. Il la prit par la main, "Par ici. Preston Street est trois pâtés de maisons plus loin, de l'autre côté." "Tu as atterri un peu trop loin, n'est-ce pas ?" le taquina Lois. Il répondit à cela par un sourire. "Une bonne ruelle sombre est difficile à trouver." Ils remontèrent rapidement Hobbs Street, sans être gênés par d'autres piétons. A ce moment de la journée, la rue était tranquille. Certaines des boutiques devant lesquelles ils passaient étaient fermées, victimes d'un voisinage déclinant et d'une révolution dans le marché qui valorisait la consommation massive des banlieusards. Des façades défraîchies faisaient face à une large rue où la circulation se dirigeait ailleurs. Preston Street était une rue différente. Elle était plus étroite, avec quelques arbres dénudés par l'hiver dressés de chaque côté comme des sentinelles, elle paraissait moins vide, même si peu de gens étaient dehors. Ceux qui l'étaient se pressaient, les épaules voûtées contre le vent glacé. Les deux journalistes passèrent devant quelques endroits en rénovation -- menuisiers et peintres étaient visibles à travers les grandes fenêtres. Les boutiques, les restaurants et les bureaux qui s'alignaient sur la rue étaient entrecoupés de studio-galeries, dont l'une d'elles était la Galerie Fringe. Clark ouvrit la porte, à demi vitrée, et déclencha une sonnerie annonçant leur présence. La salle d'exposition était claire, son plancher de bois foncé contrastait avec les murs entièrement blancs sur lesquels étaient accrochées des toiles très colorées. Des sculptures de métal coupaient la galerie, atténuant son effet de couloir. Au fond de la salle, deux jeunes hommes et une femme, à peine sortis de l'adolescence, observaient une pièce de métal déformée avec la même intensité que certains de leurs congénères réservaient à Alerte à Malibu. Personne ne se présenta comme étant le gérant ou le propriétaire de la galerie. Lois regarda le mur est de la galerie. "Martha m'a dit que la toile de Cliff est sur ce mur." Elle réfléchit quelques secondes et toucha la manche de Clark. "Je crois que c'est celle-ci." Ils regardèrent ensemble la toile que Clifford Moran avait peinte des décennies auparavant. Clark fronça ses sourcils et plissa les yeux en essayant de comprendre le sens des formes abstraites qu'il regardait, et Lois déclara : "C'est d'un symbolisme intéressant." Clark se tourna vers elle avec un regard sceptique. "Expliquez-moi, Mme Lane," la défia-t-il. "C'est évident, Clark." L'évidence n'allait pas tout de suite être dévoilée. Un homme d'un âge moyen assez costaud, au tour de taille épais, s'approcha d'eux. "Si vous êtes intéressés par cet artiste, il y a d'autres œuvres de lui dans l'entrepôt." La voix de Clark était ferme. "Nous sommes intéressés." "Par ici, si vous voulez bien me suivre." Il se dirigea vers une porte de bois sombre à l'autre bout de la galerie et se mit de côté pour les laisser passer devant. La pièce était aussi longue et étroite, parsemée de toiles posées sur le plancher et contre les murs. L'ensoleillement naturel de la salle était limité car c'était l'après-midi, les rayons du soleil ne passant que par une fenêtre à l'arrière de la pièce. Dans le coin, un homme était assis devant une petite table de bois et buvait du thé. Pendant une seconde, Lois se souvint d'un moine qu'elle avait rencontré dans un vieux monastère irlandais. L'homme leva les yeux vers les trois personnes qui entraient dans la pièce et s'avança vers elles pour les accueillir. Il portait un jeans et un vieux pull et ses cheveux gris était attachés en queue de cheval. "Clark Kent et Lois Lane ? Vous êtes là plus tôt que je ne l'attendais. Martha m'a dit que vous seriez ici dans une demi-heure." "Notre taxi a été rapide." Lois se demandait parfois si elle était meilleure ou pire que Clark pour trouver des explications raisonnables à des situations inexplicables. "Je pensais que Martha serait avec vous." "Elle va venir. Pourquoi vouliez-vous nous parler, M. Moran ?" demanda Clark. "Je vais préparer une autre théière et je vous raconterai tout." Il porta la théière vers un petit évier à l'autre bout de la pièce et la brancha dans la prise électrique. Puis, il se retourna pour examiner le couple qui se tenait face à lui. "Vous ne ressemblez pas beaucoup à Martha, M. Kent."
"Je me sentirais beaucoup mieux si je savais que vous ressembliez à Martha. Mais j'ai lu vos articles, à tous deux et je vous fais confiance. Vous avez du cran et je crois que vous êtes capables de compassion. C'est ce que j'avais à vous dire avant d'aller plus loin." "Vous pouvez nous faire confiance, M. Moran. Le Daily Planet ne dévoile pas le nom de ses sources." La voix de Lois était ferme. Moran leva les yeux vers le partenaire de Lois, cherchant son approbation. Clark acquiesça. "Je ne peux pas prendre le risque d'aller à la police. Je suppose que Martha vous l'a déjà dit. Une fois qu'ils auront vérifié mon dossier, ils trouveront une vieille accusation et je serai cuit." Clark croisa ses bras. "Avez-vous tué cet officier de police ?" "Non !" la voix de Moran était violente. "Je ne sais pas comment il est mort. Je crois qu'il est tombé sous l'une des balles que les gardiens de sécurité ont tiré." "Alors, vous avez cambriolé cette banque." "Oui. Du moins, j'ai essayé. On manquait d'argent. Trois de nos hommes étaient en prison sous des accusations bidon et nous n'avions pas assez d'argent pour payer leur caution, on ne pouvait même pas se payer un avocat décent. Nous devions braquer cette banque. Nous n'avions pas d'autre choix." Clark ne dit rien, mais Lois fonça. "Alors, que s'est-il passé dans cette prison ?" Moran haussa ironiquement les épaules. "C'était une petite prison." Il s'interrompit un instant en prenant deux tasses sur la tablette qui se trouvait au-dessus de l'évier. "Vous savez que j'ai vu toute la scène de ma cellule. L'adjoint a allumé une cigarette et s'est approché de moi et de mon compagnon de cellule, un ivrogne local qui avait été emprisonné une demi-heure plus tôt, pour nous donner une cigarette et notre dîner. L'ivrogne lui a filé une claque et a réussi à l'assommer. Je suis sorti de là très vite. J'ai lu dans le journal le lendemain que la prison avait brûlé et qu'ils pensaient que le corps de l'ivrogne était le mien. Ça m'arrangeait." Les yeux de Clark se plissèrent, indiquant sa désapprobation. "Et sa famille ?" "Il n'y a pas beaucoup d'ivrognes vivant dans la rue qui ont une famille." Clark baissa un instant la tête, comprenant le point vue de Moran. "D'accord, alors pourquoi voulez-vous nous voir ?" Sa voix était douce, mais sérieuse. "L'incendie d'hier soir n'était pas un accident. Quelqu'un essaie de se débarrasser de nous. Maintenant que j'y pense, je crois que ça a commencé il y a plus d'un mois. Des petites choses seulement. Différentes à chaque fois. Au tout début, on ne faisait que nous discréditer. Comme si nous étions à l'origine de nombreux délits." Clark, se remémorant le portefeuille de son père, leva ses sourcils. "D'accord, peut-être qu'il y a un peu de vrai. Mais d'autres choses aussi sont arrivées, par contre je ne sais pas si elles ont un rapport. Des meurtres. Ce corps qui a été jeté sur les marches du poste de police." Quand Cliff dit cela, Clark leva les yeux, pensant aux meurtres non résolus sur lesquels il avait enquêté ces derniers mois, tandis que Cliff continuait de parler. "Puis il y a eu la fuite de gaz la semaine dernière. Peut-être que c'était un accident. Mais ces deux bombes n'en étaient pas un. La LPEM ne les a pas posées." Moran les regarda tous les deux, ses yeux bleus brillaient et sa voix était profonde et passionnée. "J'aime cette ville. Nous l'aimons. Mais le monde des affaires la détruit. Pas les petits commerçants. C'est grâce à eux que ce secteur survit. Mais Bronson et les autres comme eux. Ils veulent mettre du béton partout. Ils ont oublié les parcs, les gens, les familles et les enfants. Combien d'argent peut-on gagner ? C'est la grande question. Les enfants de la rue. Qui se préoccupe d'eux ? Certainement pas les familles qui les ont molestés, qui ont abusé d'eux. Les vieux qui n'ont nulle part où aller. Nous nous sommes appropriés cette partie de la ville; la partie dont personne d'autre ne voulait. Alors maintenant, ils la réclament. C'est pour ça qu'ils veulent se débarrasser de nous. Nous envoyer en prison, nous tuer. Qui se soucie de nous ?" "Comment pouvons-nous vous aider ?" demanda Lois. En l'écoutant, Lois pouvait comprendre pourquoi Martha ne l'avait jamais vraiment oublié. "Nous devons trouver le vrai responsable des attentats. Ce n'est pas moi. Bronson voudrait discréditer la LPEM et ils peuvent le faire s'ils me prennent." La voix de Clark était enfin bienveillante. "Par où suggérez-vous que l'on commence ? Personne dans la rue ne veut parler, en supposant que quelqu'un sache quelque chose." "Ils parleront si je leur demande. Je ne suis pas certain de ce qu'ils savent, mais je crois qu'à vous deux, vous êtes capables de le découvrir. Je sais cependant qu'ils sont convaincus qu'il y a une autre bombe là dehors et ils ont peur." "D'accord," Clark laissa échapper un soupir. "Commençons avec vous. Étiez-vous aux appartements Daly hier soir ?" "Bien sûr. Nous avons fait attention à tout, surtout au feu. Croyez-moi, je sais ce que je fais quand on parle de ces choses. Si les pompiers déclarent que nous avons provoqué l'incendie, vous devez vérifier ça." "Les pompiers sont encore en train de relever des preuves. Y avait-il, hier soir, des gens avec vous que vous ne connaissiez pas personnellement ?" demanda Lois. "Non. Personne." "Est-ce que quelque chose hors de l'ordinaire s'est produit ?" Clark réalisa que sa question était étrange, étant donné que la vie dans la rue était habituellement imprévisible. "Oui, d'une certaine manière. Un vieil ivrogne, Mick, est arrivé tard, il cherchait un endroit pour dormir. Je lui ai parlé quelques fois dans la rue, mais il vit seul. C'était la première fois qu'il acceptait de rester avec nous." "Aurait-il pu provoquer l'incendie ? En fumant, par exemple ?" demanda Lois. "Non, il ne fume pas. Il en est fier. Il serait mort dans l'incendie si Superman n'avait pas été là. Peut-être que je devrais essayer de le contacter." Il s'arrêta de parler et jeta un œil à Lois et à Clark. "Mme Lane, M. Kent, on dit que Superman est l'un de vos amis proches. Est-ce qu'il y aurait moyen de le convaincre de nous aider ?" Lois replaça ses cheveux derrière son oreille. "Les rumeurs de nos relations avec Superman sont franchement exagérées. Nous n'avons pas d'influence sur lui." Elle se mit à rire. "Vous allez devoir vous contenter de deux journalistes ordinaires." Tandis qu'elle finissait de parler, le propriétaire de la galerie réapparut dans la salle, cette fois accompagné de Martha Kent. Elle salua son fils et sa belle-fille et salua plus froidement Clifford Moran. La réponse de Moran fut plus amicale. "Je suis heureux que tu sois venue, Martha. Je veux m'excuser pour samedi dernier. J'ai dit des choses que je n'aurais pas dû dire." Sa voix douce était sincère et il regarda Martha avec une tristesse qui la surprit. Pendant un instant, elle vit le jeune homme qui avait été son ami proche il y avait tant d'années. Voulant le réconforter, elle sourit et s'approcha de lui, touchant son bras. Moran encercla Martha de ses bras et lui retourna son étreinte. "C'est si bon de te revoir, Martha." Lois les observa, amusée, en remarquant que Clark croisait les bras et plissait les yeux de désapprobation en les regardant s'étreindre. Elle lui tapota l'épaule, en soupirant : "Relax, Clark." Son mari lui adressa un demi-sourire, haussa des épaules et glissa ses mains dans ses poches, mais s'étouffa presque en entendant la phrase suivante de Moran. "Tu es encore très belle, Martha Clark." Il regarda Clark. "Savez-vous comme votre mère était belle quand nous sommes retournés au Kansas ?" Lois lui répondit, les yeux rieurs : "Nous avons une petite idée." "Bon, alors, on commence ?" Le ton de Clark était très poli. "Il y a une ou deux personnes à qui vous devriez parler, mais je ne peux pas aller avec vous. Alex va vous y conduire. Quand vous leur aurez parlé, le mot va se répandre et vous n'aurez plus besoin de lui. Faites attention, la police pourrait aussi surveiller Alex. Il fait partie de la LPEM depuis à peine un an et ils ne l'ont encore soupçonné de rien. Il est presque blanc comme neige. Au fait, je n'ai pas utilisé mon véritable nom depuis que je suis mort. Les gens d'ici me connaissent sous le nom de John Marshall." Il se dirigea vers la porte et l'ouvrit, sortant de la galerie une seconde. Se tournant vers les deux journalistes, il dit : "Vous pouvez faire confiance à Alex." Puis, Moran les regarda passer devant lui. "Voudrais-tu rester et déjeuner avec moi, Martha? Ce serait bien qu'on se parle." "Bien sûr, Cliff. J'aimerais bien, moi aussi." Remarquant l'expression inquiète de son fils, Martha lui fit un geste de la main pour qu'il s'en aille, avec un petit sourire machiavélique. "A tout à l'heure, vous deux." A l'extérieur de la galerie, un grand jeune homme habillé de noir, portant un petit sac à dos qui pendait à son épaule s'approcha d'eux, ses longues jambes couvrant rapidement la distance du fond de la galerie. Bien qu'ayant environ une vingtaine d'années, il n'avait pas perdu la maladresse de son adolescence. Lois pensa qu'il ressemblait à un Abraham Lincoln punk, la barbe en moins. Elle le reconnut comme l'un des membres du trio qui étudiait la sculpture quand elle et Clark étaient entrés dans la galerie. Il tendit son long bras pour leur serrer la main et sourit poliment, comme un garçon bien élevé. "Bonjour, je m'appelle Alex. Veuillez me suivre." Tandis qu'ils le suivaient hors de la boutique, Clark se pencha vers Lois et murmura avec insistance. "Lois, on ne peut pas laisser ma mère ici toute seule." "Elle n'est pas seule, elle est avec Cliff." "C'est ce que je veux dire." "Clark, il ne va pas lui faire de mal." "Je sais cela." "Vous venez ?" Alex attendait les deux journalistes, qui s'étaient arrêtés derrière lui. "Oui. Allons-y, Clark." Comme il ne bougeait pas, elle leva les yeux au ciel d'exaspération et le tira par la main. "Clark !" Il obéit, mais elle remarqua qu'il n'était pas content. Lois et Clark suivirent Alex dans les rues avoisinantes, puis dans une ruelle étroite qui donnait sur un petit square, légèrement recouvert de neige et entouré sur trois côtés de bâtiments abandonnés, dont les fondations étaient cernées de débris de briques et de béton. Un des bâtiments avait été en partie démoli et il faisait penser à une architecture amputée, son aile était balafrée d'une cicatrice de plâtre pâle et de briques multicolores. Mais le square en lui-même était propre, tous les débris ayant été ramassés. Quelques jeunes arbres le bordaient, supportés par des tuteurs les aidant à passer leurs premières années de croissance. Des bancs avaient été ajoutés, de même qu'une aire de jeux pour les enfants, les balançoires vides attendaient maintenant le printemps. Un vieil immeuble et une église construite de pierres grises complétaient le côté ouest du square. "Par ici," dit Alex, alors qu'ils traversaient la courette et se dirigeaient vers l'église. "C'est la LPEM qui s'est occupée de ce projet." Il se tint un instant face à un jeune arbre qui n'était pas beaucoup plus grand que lui. "C'est mon arbre." Il toucha le tronc de l'arbre avec affection. "Je l'ai planté au printemps dernier. C'est un érable." Il rougit, comme s'il réalisait que cette affection pour un arbre pouvait paraître un peu étrange aux deux journalistes. Clark regarda l'arbre d'un oeil attentif. "Le tronc est assez droit et les branches se séparent bien. Il va bien grandir." Lois pensa qu'elle était entourée de fermiers. Toutefois, elle demanda : "Est-ce que John vous a aidé pour tout cela ?" "Tout ça ne serait jamais arrivé sans lui. Il a dirigé tout le monde, il nous a fait comprendre que l'on allait y arriver." L'admiration d'Alex pour le vieil homme était évidente, tandis qu'il parlait de certains des petits projets que la LPEM avait réalisés. "Étiez-vous ici la nuit dernière, Alex ?" demanda Clark. "Oui. Je n'aurais pas manqué ça. Je vis avec des amis dans un appartement à quelques rues d'ici mais je devais être là pour leur faire savoir qu'ils ne peuvent pas détruire cette ville. Regardez ce que nous avons fait ici. Cet immeuble a été abandonné. Alors on l'a réparé. A vrai dire, c'est la LPEM qui l'a fait. On a trouvé du matériel et on l'a retapé et c'est maintenant une habitation décente pour des gens qui ne peuvent pas se payer autre chose." "Est-ce que l'église vous a aidé ?" Lois était curieuse de savoir comment ils avaient réussi à mobiliser toutes les ressources nécessaires. "Un peu. L'église était également abandonnée et le diocèse l'a vendue à la LPEM pour le coût de l'acte de propriété. Quelques religieuses et un prêtre aident à administrer le refuge, qui opère maintenant à l'extérieur de l'église. Quelques-uns des types ont atterri ici après le feu de la nuit dernière." Ils entrèrent dans le hall de l'église, le plafond s'élevait dans la pénombre au-dessus d'eux. Mais la pièce était chaude et Lois déboutonna son manteau et enleva son écharpe, pendant qu'ils traversaient le vieux sol en ardoise jusqu'à la nef. Une des parties avait été transformée en salle à manger et aménagée avec de longues tables qui étaient pour l'instant inoccupées. Au-delà des tables, la pièce était séparée par une grande toile ornée d'une peinture murale multicolore. Derrière cette séparation était caché un dortoir avec des lits alignés le long du mur. Seules quelques personnes se trouvaient dans la salle. "Même quand il fait froid, plusieurs des types qui viennent ici préfèrent rester dans les rues. Ils ont toujours peur que les autorités ne leur enlèvent leur liberté, leur fassent suivre les règles, "dit Alex, en les menant vers un vieil homme au visage obscurci par une barbe grise irrégulière. L'homme regarda les nouveaux venus avec suspicion et attrapa le sac noir se trouvant à côté de lui, comme s'il avait peur qu'on le lui prenne. "Tout va bien, Andy. C'est Lois Lane et Clark Kent. Ce sont des amis de John. Ils vont nous aider à trouver qui a provoqué l'incendie hier soir." "Et où sera placée la prochaine bombe. Ils vont trouver ça aussi." Sa voix était excitée. "Quelqu'un essaie de nous tuer. Ils veulent se débarrasser de nous." "Qui ça ?" La voix de Lois était douce, tandis qu'elle s'asseyait à côté de lui sur sa couchette. L'homme eut l'air perturbé et il s'éloigna d'elle, l'observant attentivement. "Les étrangers. Des serpents. Ils veulent se débarrasser de nous." "Comment savez-vous qu'ils veulent se débarrasser de vous ?" La voix de Clark était calme. "Quelque chose de mauvais arrive après leur venue." "Qu'est-ce qui arrive ?" poursuivit Lois. "Des fuites de gaz. Des explosions. Quelqu'un qui n'est pas là le jour suivant." "Qui n'était pas là ?" Andy regarda Alex avant de répondre à Lois. "Janie n'était pas là." "D'où croyez-vous que viennent les étrangers, Andy?" La voix de Lois était douce, tandis qu'elle continuait d'interroger le vieil homme. "Ils ne sont pas comme vous. Ils sont venus dans une fourgonnette foncée." "A quoi ressemblent-ils ?" "Ils sont comme lui, grands, ils ont le même âge, un seul avait les cheveux bruns." Les yeux d'Andy se dirigèrent vers Clark. "Ils ont des vestons noirs et des grosses bottes noires. Ça coûte cher." Il s'agitait de plus en plus en parlant. "Je ne sais pas qui ils sont. Ils vont nous faire sauter." Clark répondit avec fermeté. "Pas si on peut les arrêter, Andy. Vous nous avez aidé à commencer nos recherches." Le vieil homme le contempla. "Vous avez aidé Mick hier soir. Demandez-lui. Il le sait." Il se recoucha sur la couchette et ferma les yeux. "Merci, Andy. A tout à l'heure." Alex ramena les deux journalistes à la sortie de l'église." Il y a une autre personne que j'aimerais que vous voyiez si nous pouvons la trouver aujourd'hui." "Depuis combien de temps est-ce qu'Andy est dans la rue ?" demanda Lois. "Je ne sais pas vraiment. Il est dans le coin depuis que je suis ici. Il sort d'un hôpital psychiatrique. Ils l'ont diagnostiqué comme étant en bonne santé et normal. Mais il n'a nulle part où aller et il s'embrouille facilement. C'est Superman qui a sauvé Mick hier soir." "Peut-être a-t-il aussi confondu les étrangers. Il pensait qu'ils ressemblaient à Clark." "Je ne crois pas. D'autres ont dit la même chose. John n'a pas réussi à les trouver et maintenant qu'il est recherché par la police il doit rester caché." "John ne nous a rien dit concernant des étrangers." "Il voulait probablement que vous le découvriez par vous-mêmes. Vous devez admettre que ça paraît paranoïaque et John avait besoin que vous le preniez au sérieux." "Je suppose que vous n'avez pas vu ces types ?" "Non, c'est là le problème. Je crois qu'ils font très attention quand quelqu'un est dans les environs à moins qu'il ne s'agisse d'un sans domicile fixe. Avez-vous déjà remarqué comment certaines personnes peuvent ignorer les gens de la rue." Ils le suivirent vers un endroit de la ville inhabité, dont certains bâtiments n'avaient plus que des coquilles pour murs extérieurs, là où seule l'excavation profonde des fondations faisait encore tenir la structure. Le secteur était entouré d'une chaîne métallique avec des écriteaux 'entrée interdite'. Les longues jambes d'Alex passèrent aisément par-dessus les débris, tandis qu'il empruntait un chemin qui semblait être un raccourci à travers une ruelle étroite entre deux mastodontes de pierre, ressemblant à des bateaux échoués sur une plage rocailleuse. Il fit le tour par l'arrière d'une station-service condamnée par des planches, aux pompes enlevées de leurs socles de béton, et traversa une petite rue pour arriver face à un vieil entrepôt qui avait sans doute été un jour une fabrique de vêtements. "Ce n'est pas que nous soyons contre les grandes entreprises, vous savez. On ne peut pas se charger de ça," Les yeux d'Alex glissèrent de ses compagnons aux ruines qui l'entouraient, "sans argent. Mais nous pensons avoir notre mot à dire." Il passa l'entrée de l'entrepôt dépourvue de porte et réfléchit une seconde pour s'orienter dans la faible luminosité. "Quelques types squattent ici. Vous devriez leur parler." Se souvenant de leur manque de succès un peu plus tôt dans la journée, Lois pensa que ce serait une perte de temps. Toutefois, ils suivirent Alex dans un escalier étroit sur leur droite jusque dans une pièce spacieuse avec de grandes fenêtres. La pièce était sale, le sol était nu et les murs étaient d'un gris crasseux. Dans un coin reculé, plusieurs jeunes, habillés de pulls et de vieilles vestes, étaient affalés sur des sacs de couchage au milieu de meubles de fortune. Deux d'entre eux dormaient. Alex leur présenta Lois et Clark, leur expliquant brièvement pourquoi ils étaient là. Pendant un instant, personne ne parla, chacun observant les deux journalistes. Finalement, un des membres du groupe fit signe au trio de s'asseoir par terre sur l'un des matelas vacants. Il se tourna ensuite vers une jeune fille assise à ses côtés. Elle était très maigre, à l'exception de son ventre arrondi qui indiquait qu'elle était enceinte d'environ six mois. Ses yeux étaient vitreux et elle ne semblait pas être complètement réveillée. "Sarah, dis-leur ce que tu as vu." "Je ne sais pas ce que j'ai vu. Peut-être que ce n'était rien. Parfois, je réussis à récolter de l'argent en travaillant la nuit, vous savez. Mais pas beaucoup ces temps-ci." Elle tapota son ventre. "La plupart des gars ne sont pas intéressés. Jeudi soir, je me dirigeais vers le club. Je suis passée par la vieille entrée qui mène aux tunnels du métro. Je ne sais pas si elle est encore utilisée. Je n'ai jamais vu personne là-bas. Mais jeudi dernier, j'ai vu deux hommes sortir par la grille avant du tunnel. J'ai supposé qu'ils travaillaient là. Ils en avaient l'air, en tout cas. Je marchais vers eux, mais au début ils ne m'ont pas vue. J'ai cru qu'ils traitaient une affaire, alors je me suis arrêtée devant eux." Elle arrêta de parler un instant et dirigea son regard vers Lois. "Je fais ça pour mon bébé. Je vais ramasser assez d'argent pour qu'on s'en sorte bien." Lois réprima la tristesse qu'elle ressentait pour cette enfant devant elle. "Qu'est-ce qui est arrivé ensuite, Sarah ?" "Ils se sont moqués de moi. Pas méchamment, par contre. Un d'eux m'a donné dix dollars." "Est-ce que vous vous rappelez quelque chose d'autre ?" "Ils étaient grands, mais pas aussi grands qu'Alex. Ils étaient plus forts, par contre. L'un d'eux avait une super boucle d'oreille, un serpent enroulé en argent. Il avait aussi un tatouage en forme de serpent sur la main. Je l'ai remarqué quand il m'a donné l'argent. L'autre type portait un sac de gym." "Où est ce tunnel exactement ?" demanda Clark. "Au coin de Levine et de la 22ème." "C'est là que la fuite de gaz a eu lieu jeudi dernier," dit Clark. "Quand êtes-vous tombée sur ces types ?" "Il devait être environ neuf heures. C'est tout ce qui est arrivé. J'en ai parlé à Mick quand nous étions dans l'appartement hier soir et il m'a dit qu'il avait vu les deux mêmes types. Je ne sais pas si c'est vrai. Parfois, il est déconnecté de la réalité." "Ils ont essayé de nous faire partir d'ici. Ils disent qu'il s'agit d'une propriété privée. Plus maintenant. Personne n'a utilisé ce bâtiment depuis des années. Il est donc à nous et nous n'allons pas partir." Ce commentaire venait de la bouche du jeune homme pâle qui avait donné à Sarah la permission de parler. "Qui sont-ils ?" demanda Lois. "Je n'en suis pas certain. La police était avec eux la première fois. Ils disaient représenter les propriétaires de l'endroit. Il sont revenus plusieurs fois par la suite, mais nous ne partirons pas. Nous savons qu'il va y avoir une autre bombe et nous n'avons pas peur." "Comment savez-vous ça ?" "Tout le monde le dit. Vous devez arrêter ça." "Pourquoi ne voulez-vous pas aller à la police ?" demanda Lois. Les jeunes la regardèrent comme si elle était folle. "Bien sûr, madame. Comme s'ils allaient nous prendre au sérieux." Un autre membre du groupe dit : "Les policiers sont venus ici. Ils cherchaient John. Ils ne voulaient rien d'autre. Dommage, on ne l'avait jamais vu." Il haussa les épaules et retourna à la lecture du magazine qu'il avait commencé. Ils discutèrent encore quelques minutes, mais les jeunes ne savaient rien de plus. Ils ne possédaient pas beaucoup d'informations pour commencer leur enquête. Courant sur le quai du métro, Martha se glissa dans le dernier wagon avant que ses lourdes portes ne se referment. Remarquant un siège vide, elle s'assit et jeta un œil aux autres passagers de la voiture surpeuplé. Un des aspects qu'elle aimait de Métropolis était sa population, qui reflétait toutes les parties du globe. Elle pensait que si elle discutait avec chacune des personnes, elle en saurait plus sur le monde à l'extérieur des Etats-Unis que si elle s'isolait sur une île éloignée. Bien sûr, si elle parlait à tous les gens de la voiture, ils penseraient qu'elle était folle. Une des règles implicites du transport en commun était que la personne ayant une jambe intimement coincée touchant la vôtre sur un siège trop étroit ne soit pas vraiment là. Venant d'une petite ville, Martha trouvait que cette règle était difficile à appliquer et, de temps à autre, elle la brisait et était bien contente de voir qu'on ne l'arrêtait ni ne la réprimandait pour cela. Toutefois, cet après-midi-là, elle était assise silencieusement, pensant à Cliff et à elle. C'était bon de le revoir et la discussion avait été facile, comme s'ils étaient à nouveau jeunes, excités par un nouvel artiste ou une nouvelle cause. Cependant, une certaine distance les séparait encore, en partie de sa faute car elle avait trouvé difficile de cacher son inquiétude face à la vie décousue qu'il menait, et qu'il ne pouvait s'immiscer dans son mode de vie plutôt conventionnel. Elle ne se faisait pas d'illusions quant à la recette de sa survie : une part de petits boulots divers et une part de charme, assaisonnés de quelques petits larcins. Il était un mélange insolite d'arrogance, d'ego et d'égoïsme, mais aussi dévoué qu'auparavant aux causes qu'elle trouvait, elle aussi, importantes. Quand elle revint à la maison, elle serra Jonathan dans ses bras. Elle pouvait voir à sa façon de la serrer contre lui qu'il s'était inquiété pour elle et qu'il ressentait un immense soulagement maintenant qu'elle était revenue. Son ton était bourru en lui demandant des nouvelles de l'homme qu'il n'avait jamais rencontré. Martha lui parla de Cliff et de ce qu'ils s'étaient dit, faisant savoir à Jonathan combien il était important qu'il la comprenne. Puis, ils grimpèrent tous deux l'escalier vers la nursery. Laura venait juste de se réveiller de sa sieste et Martha la prit, succombant à la chaleur adorable d'un bébé se calant dans ses bras. Cliff l'avait accusée d'avoir pris le chemin le plus court quand elle était retournée à Smallville après son court séjour en prison. Il avait eu tort. Même si elle n'avait pas douté de sa décision d'épouser Jonathan car elle savait que c'était la bonne, ça n'avait pas été facile, surtout pendant les premières années, quand ils travaillaient ensemble pour faire marcher la ferme qu'il avait hérité de son grand-père. Ils s'étaient battus tout autant que Cliff l'avait sûrement fait. Puis la douleur de ne pouvoir avoir d'enfants était arrivée, le vide qui la submergeait comme une main noire lui enserrant le cœur. Et la culpabilité qu'elle avait ressentie quand l'agence d'adoption les avait rejetés à cause de son passé. Laura gazouilla et tendit un petit bras en accomplissant la complexe tâche de se réveiller. Martha tomba sous le charme de sa petite-fille, se rappelant soudain ce que le fait d'avoir trouvé Clark avait représenté pour Jonathan et elle. Martha l'avait sorti de son petit vaisseau spatial, s'assurant qu'il était bien emmitouflé dans sa couverture bleu foncé. Elle l'avait contemplé avec étonnement, entendant à peine Jonathan dire qu'ils devaient contacter les autorités. Elle n'avait pas daigné le regarder; elle avait simplement agité la tête, sachant que ce bébé était le leur, qu'elle l'aimait et qu'elle n'allait pas l'abandonner, son petit bébé aux yeux et aux cheveux noirs, envoyé par ses parents de si loin, dans un petit vaisseau qu'ils avaient trouvé dans le champ de Shuster. Jonathan, lui aussi, avait compris, car ce qu'elle l'entendit dire ensuite de sa douce voix fut : "Rentrons à la maison, Martha. Nous allons le protéger. Je vais m'assurer qu'on ne trouve jamais ce vaisseau." Lois et Clark quittèrent l'Hôpital Général de Métropolis, essayant de donner un sens à ce que Mick leur avait dit. Mick était persuadé que le diable essayait de les tuer, de tous les tuer. Il faisait trembler la terre, rendait l'air difficilement respirable et faisait disparaître les gens. Vous devez vous cacher du diable. Le diable a des assistants. Le diable a des serpents. Ils vous trouveront où que vous alliez. Ils l'avaient presque trouvé hier soir, mais il s'était caché et ils étaient partis. Mais ils ont laissé quelque chose et ils vont revenir le chercher. Le diable et son assistant. Ils vont vous tuer. Vous devez rester sur vos gardes. Vous devez vous cacher du diable. Tandis qu'il parlait, son agitation augmentait jusqu'à ce que l'infirmière de garde appelle un médecin qui lui administra un sédatif, restant avec le vieil homme jusqu'à ce qu'il se calme. "Alors, on cherche une personne avec un serpent tatoué. Il doit y avoir un homme sur deux dans les bars de Métropolis qui a ça." Lois jeta un coup œil à son mari. "Cependant, on sait qu'il est de ta taille. Alors la recherche se limite à un homme sur quatre." Son visage s'éclaircit un instant. "Je pourrais peut-être demander à Jimmy de faire des recherches." Clark leva les sourcils. "Allons, Lois. Pense à ce qu'il devra faire, aller dans tous les bars de la ville en demandant à ces types de montrer leurs tatouages. Jimmy sera mort avant demain matin." Lois soupira. "Je n'avais pas pensé à ça." "Toi, par contre, un homme pourrait très vite te montrer ses tatouages." Clark leva ses sourcils de manière explicite. "Clark !" Lois parut choquée. "Je pourrais te surveiller. Venir à ton secours si tu en as besoin." Son ton était prévoyant. "Je suis capable de prendre soin de moi, Clark Kent." Ses yeux scintillèrent et il afficha un sourire en la regardant. "D'accord. Vas voir les bars de ton côté et je vais vérifier d'autres petites choses." "Comme ?" "Essayer de revoir les pompiers." "J'appelle Henderson et je lui demande de faire des recherches sur les types connaissant les explosifs qui pourraient ressembler à notre homme." "Allons parler aussi à Bobby le Morfal. Ce serait peut-être plus rapide que de chercher dans les bars. Et après cela, Mme Lane, je crois qu'on rentrera à la maison." Clark glissa son bras autour de ses épaules en disant cela. Les sapeurs-pompiers de Métropolis avaient trouvé les traces d'une bombe à retardement dans l'immeuble Daly. Cette information changeait le point de vue de la police sur l'identité du suspect étant donné qu'il leur était difficile de dire que leur seul suspect était le porte-parole masqué de la LPEM, qui faisait partie des personnes ayant passé la nuit là-bas. Qu'il ait été prêt à sacrifier sa propre vie semblait improbable, même si Henderson pensait encore qu'il y avait une possibilité que le leader ait pu faire sortir tout son groupe du bâtiment avant que la bombe n'explose. En faisant paraître la LPEM comme une victime, ils allaient gagner la sympathie du public. Lois leva les yeux au ciel, tandis qu'Henderson lui faisait part de ses pensées, mais elle eut la bonne idée d'étouffer sa réponse. Elle voulait qu'Henderson lui fasse une faveur et l'énerver ne semblait pas être un bon choix stratégique. Elle lui demanda la liste des personnes connues pour leur talent en matière d'explosifs illégaux et tendit l'oreille au silence de son interlocuteur à l'autre bout du fil. Henderson réfléchissait, c'était toujours bon signe, pensa-t-elle. "Qu'est-ce qui vous fait croire à Kent et à vous que notre homme n'est pas le bon ?" "Nous avons parlé à quelques personnes qui vivent à l'Annexe." "Nos policiers l'ont fait aussi. Ils n'en ont rien tiré. Ces gens sont très renfermés. Personne ne connaît cet homme masqué. Vous avez trouvé quelque chose sur lui ?" "Henderson, pouvez-vous faire cette recherche pour moi ? Il y a une peur collective là-bas qu'il y ait une autre bombe." "Oui, ça ne me surprendrait pas. Nous avons eu vent que la fuite de jeudi dernier n'était pas un accident. Je demande à Liz de mettre votre description dans l'ordinateur et on verra ce qu'on trouve." "Merci, Henderson. A charge de revanche." Lois pouvait être généreuse quand l'occasion se présentait. Elle raccrocha le combiné et sortit de la cabine téléphonique. "Il va le faire. Allons chercher Bobby." Ils trouvèrent Bobby le Morfal à la cafétéria où il travaillait de temps en temps mais, pour une fois, il n'en savait pas plus qu'eux. Il avait remarqué la nervosité dans les rues et il savait qu'elle était due à la peur des attentats à la bombe, aux incendies et aux meurtres non résolus sur lesquels Bobby savait que Clark enquêtait. Il s'excusa en ronchonnant et leur raconta le peu qu'il savait. Ce soir-là, Superman examina le Vieux Marché et le quartier de l'Annexe. Il radiographia le secteur en ralentissant le plus possible et en volant à basse altitude. En entrant dans les tunnels sous cette partie de la ville, il fit une inspection éclair des crevasses et des coins sombres de l'endroit. Quelques tunnels étaient utilisés -- certains tunnels du métro se croisaient sous la ville, mais la plupart étaient maintenant abandonnés. Quelques-uns d'entre eux avaient été construits presque cent ans plus tôt quand le système souterrain avait était crée, tandis que d'autres avaient été construits pour permettre l'accès aux égouts et aux tuyaux de vapeur et de gaz. Tandis qu'il se précipitait dans ces étroites ouvertures, il remarqua des hommes et des femmes sans ressources, telles des taupes établissant un campement pour la nuit. Dans certains cas, il s'agissait de cartons posés ça et là lui indiquant que ces tunnels étaient des résidences permanentes, permettant aux gens qui y demeuraient de se protéger du froid de l'hiver. Il ne trouva aucun signe indiquant la présence d'une bombe. Quand il rentra chez lui, la maison était dans la pénombre à l'exception d’une lumière à l'étage. Après s'être arrêté quelques instants dans la chambre de Laura, il prit le couloir et se dirigea vers sa chambre. Elle était vide. Remarquant la lumière qui sortait de la porte ouverte à l'autre bout de la pièce, il sourit, tourbillonna pour revêtir son peignoir et entra dans la salle de bains. Lois était allongée dans un bain moussant, les cheveux attachés en queue de cheval, et se frottait les épaules. Elle lui sourit tandis qu'il s'appuyait contre le plan du lavabo. "As-tu trouvé quelque chose ?" "Non. J'ai fait des recherches minutieuses. Il n'y avait pas de bombe. L'endroit est sûr." "Bien." Elle avait remarqué que ses yeux avaient quitté son visage et erraient maintenant sur le reste de son corps. Elle sourit et courba le dos de manière provocante, flirtant silencieusement avec lui, en s'aspergeant l'épaule d'eau savonneuse. "Donc, tu es à la maison pour un bon moment ?" Quand leurs yeux se croisèrent, elle sourit en voyant son expression mi-moqueuse, mi-passionnée.Ce qu'elle avait envie de faire, pensa-t-elle en souriant, était de laisser ses mains savonneuses glisser sur chaque centimètre carré de la peau de son mari. Elle sortit de la baignoire, le corps perlé de gouttelettes d'eau et attrapa une serviette. Il la devança. "Oui, je suis là pour un bout de temps. Y a-t-il quelque chose que je puisse faire pour toi ?" Sa voix était à la fois enjouée et pleine d'espoir, tandis qu'il commençait à l'essuyer doucement avec la serviette. "Hmmm. C'est si bon." Elle ferma à demi les yeux pendant qu'il parlait, se courbant tandis qu'il lui essuyait les épaules puis il se pencha en avant pour couvrir sa bouche d'un de ses baisers doux et tendres. Elle posa alors ses mains sur sa poitrine et leva les bras à la hauteur de ses épaules, tandis que leur baiser devenait de plus en plus passionné. "Il y a peut-être une ou deux choses que vous pourriez faire pour moi, M. Kent." "Je suis heureux d'être à votre service, Mme Kent." Il passa sa main derrière elle et dénoua le ruban qui attachait ses cheveux. "J'ai peut-être votre homme." La voix d'Henderson paraissait venir de loin tandis qu'il parlait à Lois le matin suivant, comme s'il faisait quelque chose en même temps. "Jeff Saracini. Cheveux noirs, yeux noisette, un mètre quatre-vingt-dix, un tatouage en forme de serpent sur la main droite et l'avant-bras gauche, relâché il y a un an du pénitencier de New Troy. Libéré sur parole. Accusé d'incendie volontaire et d'agression. Capable de fabriquer des explosifs. Comment le saviez-vous, Lane ?" "On a parlé à beaucoup de monde hier. Le truc à propos des serpents revenait toujours, pas toujours dans des conversations lucides, mais trop souvent pour qu'on l'ignore." "Y a-t-il quelqu'un à qui nous devrions parler ?" "Oui, je pense que oui, mais je ne suis pas certaine que cette personne le veuille. Laissez-moi lui parler d'abord. Je vais faire en sorte qu'elle accepte de vous rencontrer à l'extérieur du poste de police." "Lois, ce type n'est pas un gentil. J'ai dans l'idée que Kent va vous tenir éloignée des problèmes. Étonnée, Lois fixa un instant le combiné. "Ecoutez Henderson, je n'ai pas besoin d'un chaperon." "Non ? La maternité ne vous a pas changée ?" "Non, pas du tout." L'indignation dans la réponse de Lois força Henderson à rire et il raccrocha. Pourquoi tout le monde pensait donc qu'être mère devait la faire ralentir ? Elle avait eu un bébé, pas une transformation de sa personnalité. Après avoir brièvement gribouillé quelques mots, elle posa la note sur le bureau vide de Clark. Quelques instants plus tard, elle appuyait sur le bouton de l'ascenseur. Une demi-heure plus tard, elle traversa quelques ruelles et escalada les décombres pour atteindre le bâtiment que Clark, Alex et elle avaient visité la veille. Elle allait essayer de persuader Sarah de parler à Henderson. La jeune fille était réticente; elle avait peur d'être arrêtée pour racolage et plus que tout, elle était terrifiée à l'idée qu'on puisse la garder jusqu'à ce que le bébé soit né et qu'on le lui enlève. "Vous ne comprenez pas, n'est-ce pas ? Je ne veux pas perdre mon bébé. Personne ne m'a jamais aimée. Mon bébé sera quelqu'un qui m'aimera." Lois était au bord des larmes. Une partie d'elle croyait que la meilleure chose à faire était d'enlever cet enfant à cette fille-mère et cependant, elle comprenait que Sarah ne puisse se remettre de cette perte. "Sarah, personne ne va vous enlever votre bébé. Je vous le promets. Mais vous devez d'abord nous faire confiance et nous laisser vous aider." Sarah accepta finalement d'aller au refuge avec Lois. Elle parlerait à Henderson là-bas, mais elle n'irait pas au poste de police. Mettant son anorak de ski noir par-dessus son pull trop grand, elle se leva et suivit Lois dans la rue. Elle emmena Lois jusqu'au refuge, empruntant un chemin plus long, mais qui comportait moins d'obstacles et de ruelles sombres. Sarah atteignait un stade de sa grossesse qui interdisait les prouesses. Une fois au refuge, Lois confia Sarah à une religieuse qui apportait son aide ce matin-là. Pendant que Lois appelait le poste de police, elle espérait que Sœur Jeanne ferait en sorte de fournir à Sarah une aide à long terme. Quand elle joignit Henderson, il lui dit qu'il serait là le plus rapidement possible. Lois retourna à la longue table à tréteaux pour prendre un café pendant que Sarah commençait à manger un repas que la religieuse avait préparé. Lois sourit à la religieuse, lui demandant silencieusement de s'occuper de la jeune fille. Pendant que les trois femmes discutaient au cours du déjeuner, Alex arriva à l'église, légèrement essoufflé. Remarquant Lois, il se dirigea rapidement vers la table. "Lois, j'allais vous appeler. Je viens de voir les deux types dont Sarah a parlé." "Où ? Allons-y, Alex. Il faut qu'on les suive." "Où est votre partenaire ?" Alex avait l'air incertain. "Je me sentirais mieux s'il était là." "Il est sur, euh, un autre article." La vérité était que Clark avait entendu parler d'une grosse tempête en Mer du Nord, qui menaçait de détruire les plate-formes pétrolières, mettant en danger la vie des ouvriers qui y vivaient. "Il nous rejoindra plus tard, s'il a le temps. Sarah fera savoir à Henderson que nous sommes partis," dit Lois tandis qu'elle et Alex quittaient l'église en toute hâte. Bien sûr, puisque ni l'un ni l'autre ne possédait d'information spécifique sur leur destination, ce serait difficile. Lois Lane, sur la piste d'un gros article, n'était pas toujours logique quant aux détails. "J'ai vu ces types sortir d'une camionnette à quelques rues d'ici. Je suis allé les voir de plus près et j'ai remarqué le serpent tatoué sur la main d'un des gars." Alex était très excité et il parlait très vite. "J'ai cru qu'il valait mieux que je vous appelle et le refuge était au coin de la rue." Ils coururent jusqu'au pâté de maisons où Alex avait vu les hommes et il les repéra tournant au coin d'une rue près des bâtiments du refuge. "D'accord, Alex, allons-y doucement." Ils ralentirent le pas, restant assez loin pour ne pas être repérés, mais assez près pour voir le groupe s'arrêter au milieu du trottoir juste devant eux. Lois tira Alex dans l'embrasure de la porte d'une boutique abandonnée. Les deux hommes s'arrêtèrent face à une grille sur le trottoir et regardèrent de chaque côté de la rue déserte. Ne voyant personne, le plus grand des deux tira la grille et l'ouvrit, puis tous deux descendirent et disparurent. "Alex, je descends là-dessous. Retournez au refuge et avertissez Henderson quand il arrivera," murmura Lois en sortant de l'embrasure de la porte. "Vous ne pouvez pas faire ça." La voix d'Alex grimpa d'un décibel. "Je viens avec vous." "Tout va bien se passer, Alex, j'ai déjà fait cela auparavant. Je vais faire attention. J'ai besoin de vous pour avertir Henderson." Elle le regarda tout en parlant, la voix confiante, prête à le laisser partir. Alex hésita puis se décida. Il lui toucha rapidement l'épaule. "Très bien, mais je vais revenir dès que j'aurai terminé." Se retournant, il courut vers l'endroit d'où ils étaient venus, ses longues jambes tendues comme les pattes d'une autruche en pleine course. Lois dégagea la grille de son support métallique et descendit l'échelle de fer attachée au puits, sous la surface de la rue. Sautant les soixante derniers centimètres, elle atterrit sur le sol poussiéreux d'une petite aire aux allures de grotte, avec des tunnels menant dans deux directions. Super, pensa-t-elle. De quel côté allait-elle aller ? Elle remarqua ensuite sur le sol des empreintes se dirigeant vers le tunnel de gauche, elle le suivit, prenant garde de longer le mur au cas où elle se rapprocherait des deux hommes. Après plusieurs minutes interminables à se frayer un chemin dans l'obscurité, Lois entendit enfin leurs voix devant elle, mais elle ne comprenait pas ce qu'ils disaient. Clark, tu fais ça trop facilement, dit-elle à son partenaire absent. Il était difficile de marcher dans le noir, elle garda donc sa main droite sur le mur du tunnel pour se diriger. Elle se demandait s'il y avait des rats. Et il y en avait. Soudain, elle put clairement entendre ce que disaient les deux hommes. Ils s'étaient arrêtés et Lois vit un petit cercle de lumière provenant d'une lampe torche, contrastant avec le sol sombre. "Ça fera l'affaire. Je crois qu'on est dessous. Il n'y aura plus personne ici pour un moment. Donne-moi la boîte." Il y eut ensuite de légers bruits de mouvements, mais pas de paroles. Lois espérait tellement voir ce qu'ils faisaient. Puis, de nouveau les voix reprirent. "D'accord, la minuterie est activée." "Dans combien de temps est-ce qu'on doit être partis ?" "On a plus de temps qu'il nous en faut. Ça va exploser en pleine heure de pointe, ça fera une meilleure impression à ce moment-là. On n'aura plus de problèmes et le patron nous donnera notre prime." "Ouais. Son assistant va nous contacter à l'aéroport aussitôt que les infos de dix-huit heures parleront de l'explosion. Il nous donnera l'argent et on sera dans le prochain vol en direction de la plage." A ce moment, Lois commit une erreur fatale. Dans l'effort d'essayer de voir les deux hommes, elle quitta l'ombre du mur; une décision qui la mit à la portée de la lampe de poche se dirigeant maintenant vers elle, tandis que les deux hommes commençaient à revenir vers le puits et sa grille. "On dirait qu'on a des problèmes." Les yeux couleur noisette qui la fixaient scintillèrent. Lois se retourna et se mit à courir. Mon Dieu, elle ne pouvait rien voir avec cette obscurité. Elle mit le pied dans une flaque, perdit une seconde l'équilibre, puis glissa dans la boue. Cette seconde suffit à ses adversaires pour couvrir la distance qui les séparait. Instinctivement, elle se retourna et donna un coup de pied, atteignant dans l'aine le premier de ses poursuivants. Il tomba par terre, rugissant de douleur avec une série de jurons qui résonnèrent sur les parois du tunnel. Son partenaire l'ignora et continua de courir vers elle. Sans même s'en rendre compte, Lois se mit en position. Avec un peu de chance, elle pourrait peut-être assommer les deux hommes. Elle savait qu'elle ne pouvait pas lui échapper. Il s'arrêta à environ trois mètres d'elle et elle vit qu'il tenait un revolver. "C'est terminé." Son partenaire se leva, marcha vers elle et la fixa un instant sans parler. Puis, il la frappa violemment au visage. Lois chancela sous la douleur puis essaya de lui donner un second coup de pied, mais elle ne réussit qu'à l'atteindre faiblement à la cuisse. Il la frappa à nouveau, la projetant contre le mur du tunnel. La douleur du coup la brûla au fer rouge et puis tout devint noir. "Elle est morte ?" demanda l'homme au pistolet. Son partenaire posa un genou à terre pour regarder Lois de plus près. "Je ne sais pas, mais je sais qu'elle est drôlement sonnée. Qui sait pendant combien de temps elle va rester comme ça. Achève-la, Jeff. On ne veut pas de témoins." "Pas avec ça." Jeff remit le pistolet dans son manteau. "Pas la peine de laisser des preuves." Il attrapa le bras de Lois et la traîna dans les flaques huileuses du tunnel, tandis que son partenaire suivait. "Ça y est. Elle est assez près de la bombe, comme ça quand elle explosera, elle y passera aussi. Il y a une corde dans mon sac. Donne-la moi." L'autre homme lui lança la corde et Jeff attacha les poignets de Lois derrière son dos et ensuite ses chevilles avec le reste de la corde. Puis il se servit de son foulard pour la bâillonner. "Allez, sortons d'ici. Avant qu'ils ne la trouvent, on sera en Amérique du Sud." Il se leva et les deux hommes coururent dans le tunnel et remontèrent dans la rue. Lois resta inconsciente une dizaine de minutes et eut de la chance. Deux vieillards, habillés pauvrement et à moitié ivres, entrèrent dans le tunnel, cherchant la chaleur. Un vieux chien bâtard trottinait à leurs côtés. Les deux hommes se disputaient les restes d'une bouteille de whisky bon marché, quand le chien s'éloigna d'eux pour aller renifler la forme étrange du corps de Lois. "Walt, regarde ce que j'ai trouvé." Le plus vieux des hommes se pencha au-dessus de Lois. Il gratta une allumette et l'observa. "Je crois qu'elle est morte." Il jeta un coup d'œil surpris à son compagnon. "Peut-être qu'elle a de l'argent," dit Walt, alors qu'il commençait à fouiller le contenu de ses poches. Il y trouva un billet de vingt dollars et sourit. Sortant son couteau, il coupa les liens autour des ses poignets. "Aide-moi à lui enlever son manteau. Elle n'en aura plus besoin." Quand il lui enleva son manteau, il la contempla pendant un instant. "Pauvre gosse. Pas d'endroit où mourir." "Sortons d'ici, Joe. On va pouvoir s'acheter une ou deux bouteilles avec ces vingt dollars et on dira à quelqu'un qu'elle est ici." "On ne peut plus faire grand-chose pour elle." Quand Alex revint au refuge, Sarah était partie. Sœur Jeanne lui expliqua que la jeune fille avait perdu courage, mais qu'elle avait l'espoir de la voir revenir plus tard. "Je suis inquiète au sujet de son poids, Alex. Elle est trop maigre. Nous devons prendre soin d'elle." "Oubliez ça, ma Sœur, est-ce que le policier est arrivé ?" "Non. Nous avons eu un appel tout de suite après que vous soyez partis. Il a été retardé d'une heure." "Quoi ?" Alex courut vers le téléphone. Pour plus de sûreté, il appela le poste de police, ainsi que le bureau de Clark Kent au Daily Planet, l'avertissant qu'il savait où se trouvait la grille. Alex laissa un message sur la boîte vocale de Kent, identique à celui qu'il avait laissé à la police. Super, pensa-t-il, tout le monde a des choses plus importantes à faire. Il demanda à la religieuse de lui prêter une ou deux lampes de poches et quitta le refuge. Lois grogna et leva la main pour toucher l'arrière de sa tête qui l'élançait. Pendant quelques instants, elle chercha où elle était. Regardant ses pieds, elle vit qu'ils l'avaient attachée, mais comment avait-elle été détachée ? Elle tendit la main et défit la corde qui nouait ses chevilles. Où était passé son manteau ? Il fallait qu'elle bouge, mais tout ce qu'elle avait envie de faire était de se coucher et de dormir. Il fallait qu'elle se lève. Elle se leva lentement en s'appuyant sur le mur du tunnel, se disant qu'elle avait quelque chose à faire. Puis, elle se rappela de quoi il s'agissait. Il y avait une bombe quelque part. Elle devait le dire à quelqu'un; elle devait sortir de là. Elle avait l'impression d'avoir été droguée. Poussant ses limites à l'extrême, elle tituba sur la courte distance la séparant de l'échelle qui allait la ramener dans la rue. Pendant un instant, l'air frais la revigora, comme de l'eau froide par un temps chaud. Elle pouvait le faire. Elle commença à se diriger vers le refuge de l'église, tremblante et luttant contre les étourdissements qui lui troublaient l'esprit et le corps. Il faut que j'aille à la maison. Laura a besoin de moi. Clark, où es-tu ? Laura ! Il y a une bombe. Elle ne savait pas trop où elle allait. Etait-ce cette ruelle par laquelle Alex était passé ? Elle ne le savait pas. Il n'y avait personne dans les environs. Tout devenait noir et sa tête lui faisait mal. Elle trébucha sur des briques cassées et tomba. Bon sang, non ! Sa tête l'élançait et elle luttait contre la nausée qui lui remontait dans la gorge. Pourquoi prenait-elle ces risques ? Qu'essayait-elle de prouver ? Qui essayait-elle d'impressionner ? Il fallait qu'elle se relève. Si seulement ce poids qu'elle avait sur le dos disparaissait. Elle ne voyait pas clair, la rue disparut dans une blancheur éclatante et l'obscurité vint à nouveau l'entourer. Elle ne se releva pas. Quand Alex quitta le refuge, il retourna vers les bâtiments habités, interceptant les trois premiers hommes qu'il connaissait et ils coururent jusqu'à la rue où il avait laissé Lois Lane. Les quatre hommes descendirent l'échelle du puits et se séparèrent, deux dans chaque tunnel. C'est Alex qui trouva le sac de Lois. Il appela les autres et tous quatre fouillèrent le tunnel, mais ils ne trouvèrent pas de signe de la journaliste. Arrêtant leurs recherches, il retournèrent à la rue. "Ils ont dû l'emmener avec eux," dit Alex. "Je vais chercher la police." Ces mots firent disparaître ses trois compagnons vers la sécurité des petites ruelles qu'ils connaissaient si bien. Clark Kent était satisfait du sauvetage des ouvriers de la plate-forme pétrolière de la matinée. Tout le monde était en sécurité et il avait réussi à rattacher la plate-forme géante pour qu'elle soit préservée de la violence de la tempête. Ça n'avait pas été difficile. Maintenant, il pouvait retourner à un travail rémunéré, pensa-t-il, en entrant au Daily Planet. Sans même sans rendre compte, la première chose qu'il fit en sortant de l'ascenseur fut de balayer du regard la salle de rédaction à la recherche de Lois. Il faisait ça depuis son premier jour au Planet et il était toujours désappointé quand elle n'était pas là. "Hé, Jim, tu as vu Lois ?" demanda-t-il, en passant devant le jeune homme pour se rendre à son bureau. "Pas depuis midi, C.K. Je crois qu'elle est sortie pour un article." "Elle t'a dit où elle allait ?" "Je ne sais pas. Je n'ai pas pu lui demander. Perry voulait que je lui fasse des photos du carambolage au carrefour de Main et de la 2ème. Par contre, Je crois qu'elle vous a laissé un mot." Clark parcourut les papiers et le courrier qui s'étaient empilés sur son bureau depuis quelques heures et y trouva le petit mot. En le lisant, il pensa que maintenant elle aurait dû être revenue. Il écouta ensuite ses messages et entendit celui d'Alex. Lois, non, pourquoi fais-tu des choses pareilles ? Le message le plus récent était celui d'Henderson : "Kent, un certain Alex Jefferson vient d'appeler et il a dit qu'on ne savait pas où était Lois. C'est vrai ? Lois est-elle là ? Je vais au carrefour de Lexington et de la 27ème pour vérifier cela." Clark courut et passa devant Jimmy, en se dirigeant vers l'ascenseur. "Qu'est-ce qui se passe, C.K. ?" "Je n'ai pas le temps de discuter, Jim. Plus tard." Les portes de l'ascenseur se refermèrent au moment où il finissait sa phrase. Quelques secondes plus tard, il survolait la ville et arrivait bientôt au coin de Lexington et de la 27ème où Henderson se trouvait avec ses forces de police. Alex était avec lui. En quelques secondes, les deux hommes étaient sortis de la voiture et se tenaient sur le trottoir à côté de lui. "Wow ! Superman !" Alex ne l'avait jamais vu et il était aussi ahuri que s'il avait rencontré le fantôme de Kurt Cobain. "Que s'est-il passé ?" demanda Superman. Alex lui expliqua la situation, avec une inquiétude grandissante, visible aux mouvements de ses grands bras, Superman sentit souffler en lui un vent de panique. Il s'envola, fouillant les rues et les ruelles. Quand il vit dans une ruelle un corps étendu, il pria tout d'abord pour que ce ne soit pas Lois, même s'il était sûr que c'était elle. Atterrissant à ses côtés, il se pencha sur elle, heureux d'entendre battre son cœur. "Lois," sa voix était une douce plainte, mi effrayée, mi suppliante, mais les yeux de Lois ne s'ouvraient pas. Il la tourna très doucement et caressa le petit filet de sang qui avait coagulé sur son front. "Lois," murmura-t-il, en l'entourant de sa cape, il la prit ensuite dans ses bras et la conduisit vers le service des urgences de l'Hôpital Général de Métropolis. Il entra dans la salle d'attente et fut tout de suite reçu par une infirmière. "Savez-vous ce qui lui est arrivé ? Depuis combien de temps est-elle inconsciente ?" "Non. Je l'ai trouvé dans une ruelle." Un des médecins accourut et jeta un bref coup d'œil à Lois. "Portons-la immédiatement dans une chambre. Elle est en état de choc et souffre probablement d'hypothermie. Son visage est enflé. Je dirais que quelqu'un l'a frappée très fort. Avec de la chance, rien d'autre. Ça dépend depuis combien de temps elle est inconsciente." Pendant ce temps, l'infirmière de service et une autre plus âgée avaient déposé Lois sur une civière et l'amenaient dans une des salles d'urgence. Superman les suivit. "Hum, Superman. Nous pouvons nous occuper d'elle maintenant." Le médecin, une jeune femme efficace, hocha la tête en regardant Superman. "Nous allons voir si nous pouvons contacter un membre de sa famille. Toutefois Elaine, évitez le mari ou le petit ami," dit le médecin à l'une des infirmières. "Huit fois sur dix, c'est lui qui a cogné." L'infirmière remarqua quelque chose : "Elle n'a pas de sac à main. Je vais vérifier dans ses vêtements si elle a une carte d'identité. Je suppose que vous n'avez aucune idée de son identité, Superman?" Superman jusque là s'était senti mal à l'aise. Il se tenait silencieusement dans un coin, alors que tout ce qu'il avait envie de faire était de hurler : "Je vais avec elle. C'est ma femme et je ne veux pas la laisser." Au lieu de cela il dit, le plus calmement possible : "Son nom est Lois Lane Kent. C'est une de mes amies. Je vais rester avec elle jusqu'à ce que je sache si elle va bien." Sa voix était ferme. Il n'irait nulle part. "C'est une journaliste du Daily Planet, n'est-ce pas? Je ne suis pas à Métropolis depuis longtemps, mais j'ai lu certains de ses articles. Pas mal. Je suppose donc qu'elle ne fait pas partie des huit femmes sur dix," dit le médecin tandis qu'ils marchaient derrière la civière jusqu'à la salle des urgences. "Non, elle n'en fait pas partie." Les mots de Superman étaient brusques, tandis qu'il suivait la femme. Il pensa en son for intérieur : mais c'est la faute de son mari. Il faisait les cent pas dans la salle d'attente pendant qu'on examinait Lois. Même un super homme ne pouvait pas convaincre une infirmière de briser le règlement en matière de procédure médicale. Les deux autres personnes dans la salle d'attente étaient surprises de sa présence et n'osaient pas le regarder. Il se passa peu de temps avant que le médecin ne réapparaisse. "Superman, votre amie a une sévère commotion, mais pas de fracture du crâne. La raison de cette commotion est qu'elle a été frappée à l'arrière de la tête. Elle souffre aussi d'hypothermie car elle est restée dehors, mais ce n'est pas grave. Elle a été frappée assez durement au visage, mais je dirais que c'est la chose la moins sérieuse. Espérons qu'elle se réveillera bientôt." "Je vais appeler son mari. Il sera là dès que possible. Puis-je la voir une minute avant de partir ?" Le médecin, qui paraissait comprendre son humeur, lui sourit. "Bien sûr, ne vous inquiétez pas, Superman. J'ai vu de nombreux cas pires que celui-ci. Mais vous devriez peut-être essayer de parler à votre amie pour qu'elle prenne moins de risques." J'aimerais bien, pensa Superman, en passant derrière le médecin jusqu'à la chambre de Lois. Il resta un moment dans l'embrasure de la porte, observant sa femme et il sentit son cœur se serrer. Et si ça avait été plus grave ? S'arrêtant à côté du lit, il lui caressa la joue du revers de la main, la seule chose qu'il pouvait faire avec les autres personnes dans la pièce. "Merci, Docteur. Je vais appeler son mari. Il sera là dès qu'il le pourra." Puis il sortit dans le couloir, cherchant une cage d'escalier tranquille pour changer rapidement de vêtements. Clark appela d'abord ses parents puis Perry White, pour leur dire ce qui s'était passé. "Bon sang, Kent, ne pouvez-vous pas mieux contrôler les faits et gestes de cette fille ?" "Non, Chef, je ne peux pas. J'aimerais bien, mais je ne peux pas," dit-il, sa frustration s'élevant. Aussi puissant qu'il l'était, il n'avait jamais réussi à la contrôler. Pourquoi même y penser ? Il ne voulait pas la contrôler. Il voulait simplement la garder, garder sa famille saine et sauve. Elle savait que je n'étais pas là. Qu'est-ce qu'elle essayait de prouver ? Mais il ne parvint pas à répondre à ces interrogations. "Clark, restez là jusqu'à son réveil. Il faudra plus qu'une claque sur la tête de cette femme pour la garder sur la touche, fiston." "Merci, Perry." Il raccrocha le téléphone et appela Henderson pour lui dire que Superman avait trouvé Lois. Il lui dit qu'il était de tout cœur avec lui et il lui donna ensuite cette nouvelle information : "Kent, Lois avait raison. Nous avons découvert une bombe un peu plus loin dans le tunnel, là où le jeune homme à trouvé le sac. Au fait, ce n'est pas la version officielle. Je ne veux pas que la personne qui a planqué la bombe sache que nous l'avons trouvée. Et je veux parler à Lois aussitôt qu'elle sera réveillée." Clark passa l'heure suivante au chevet de sa femme inconsciente à l'observer et à lui parler. Pendant qu'il était assis là, il commença à construire une grande cabane dans sa tête, un genre de forteresse, reculée et isolée de tout. Il y emmènerait Lois et Laura pour les protéger. Il n'y aurait pas de plans machiavéliques pour lui enlever ses enfants, pas de tentations pour distraire Lois. Tandis qu'il planifiait les détails de sa cabane, il commença à se relaxer. Elle serait construite comme Lois l'aimerait, avec des pièces pour laisser entrer le soleil. Il regarda son visage plein d'ecchymoses et le bandage sur son front et il eut l'impression qu'elle lui parlait. "Tout ça est très beau, Clark, mais nous serons tes prisonnières." Il se pencha et toucha son visage, couvrant sa joue de la paume de sa main. "D'accord, mon amour, je ne la construirai pas," lui dit-il, "mais tu dois me promettre que tu vas faire plus attention à l'avenir." Lois ouvrit les yeux tandis qu'il lui parlait. "Qui ne construira pas quoi ?" Sa voix était rauque, fatiguée, et elle leva les yeux vers lui, confuse. Puis, elle se réveilla. "Clark, il y a une bombe. Tu dois t'en débarrasser." Les intentions de Clark étaient différentes. Il avait pressé sur le bouton pour appeler l'infirmière, il était maintenant dans le couloir s'assurant que quelqu'un allait venir. Puis, il retourna à son chevet. "Je sais, ma chérie. Henderson l'a déjà trouvée." Il lui sourit, soulagé de la voir reprendre conscience, il était délivré et heureux. "Tu sais, je n'ai jamais rien vu de plus beau que toi," dit-il, en glissant ses doigts dans ses cheveux. Lois parvint à sourire faiblement. "Merci, Clark. C'est gentil. Maintenant, si tu pouvais arrêter mon mal de tête, je t'en serais très reconnaissante." Il embrassa délicatement et respectueusement la grosse ecchymose qui s'était formée sur son visage. "Lois, tu dois arrêter de te balader dans des tunnels noirs, dans des bâtiments en feu, des entrepôts qui explosent et sur des terrains . . . " Sa voix était encore pâteuse : "C'est pas juste. Là, je crois que tu marques un point." "Tu crois ?" Clark paraissait surpris et sentit un rayon de lumière passer à travers son âme. "Clark." La voix de Lois était pressante. "Il y a autre chose. Quelle heure est-il ? Les types qui ont posé la bombe. Ils vont retrouver quelqu'un qui doit les payer à l'aéroport aussitôt que les infos parleront de l'explosion. Est-ce qu'il reste encore du temps ? Tu dois y aller." "Chut. Tout va bien, on a encore le temps." Tout juste. Il appela à Henderson et lui dit de retrouver Clark Kent à l'aéroport aussi vite que possible. Superman n'eut pas de mal à arriver à l'Aéroport International de Métropolis; il lui fut cependant plus difficile de trouver deux hommes dont il n'avait qu'une très vague description, dans une foule de plusieurs milliers de personnes fourmillant aux portes de sorties. Henderson fit distribuer par son équipe un portrait-robot de Jeff Saracini, ainsi qu'une description des deux suspects, au personnel de l'aéroport aux portes d'embarquement. Ses hommes, tout comme ceux du service de sécurité de l'aéroport, étaient postés un peu partout au terminal. L'inspecteur avait demandé aux chaînes de télé et aux stations de radio de diffuser la nouvelle de l'explosion en dernière minute. Il espérait que d'ici là les deux suspects seraient repérés et que le paiement aurait eut lieu. Il restait une heure à attendre. Il était trop heureux d'avoir Clark Kent comme observateur supplémentaire. Ils avaient besoin de toute l'aide qu'ils pouvaient trouver. "Restez en dehors de ça si ces types cherchent la bagarre, Kent." Henderson donna à Clark une copie du portrait-robot. "Ne vous inquiétez pas, je peux très bien m'occuper de moi." "Ce n'est pas pour vous que je suis inquiet. Je ne veux pas qu'il y ait de bavures provoquées par des maris aux désirs de vengeance." Ils resserrèrent la surveillance autour des portes d'embarquement des vols partant après dix-neuf heures, sachant que les deux fugitifs allaient s'arranger pour prendre leur argent à la dernière minute, juste avant de passer à l'enregistrement des bagages. La police eut un coup de chance. L'une des hôtesses se rappela avoir enregistré les billets des deux hommes. Elle se souvenait d'avoir vu le serpent tatoué sur la main de l'homme qui lui avait tendu son billet, elle avait trouvé inhabituel qu'ils n'aient qu'une seule valise pour un vol à l'étranger. Ceci combiné avec la tentative de son compagnon de la draguer, faisait qu'elle se souvenait d'eux. Les recherches se resserrèrent à la porte d'embarquement numéro 12, qui avait un vol en partance pour Buenos Aires décollant à dix-neuf heures trente. Clark fut le premier à repérer les deux hommes, qui étaient assis au bar à regarder la télé, à une certaine distance de l'endroit où il se tenait. En les observant, il se sentit isolé de la foule qui l'entourait, isolé par la rage qui bouillait en lui. Un de ces hommes avait attaqué Lois. Il appela Henderson et fut rejoint presque immédiatement par un policier en civil. Henderson arriva quelques instants plus tard. "Vous avez une vue incroyable, Kent. Je ne peux rien voir d'ici," murmura Henderson, en passant devant Clark pour se diriger vers le bar. Il prit un siège à l'autre extrémité du comptoir et attendit. A la fin du bulletin d'informations, le journaliste interrompit la poupée Barbie de la météo pour une nouvelle de dernière minute annonçant une énorme explosion dans l'Annexe du Vieux Marché. C'était leur signal. Une femme vêtue d'un tailleur s'assit sur le siège à côté des deux hommes et commanda un Sprite. Elle fouilla dans son sac à main, en retira une enveloppe et la posa à côté de l'homme aux tatouages. Quand le barman lui apporta sa boisson, elle se leva , prit sa boisson sans dire un mot et alla s'asseoir à une des tables entourant le bar. L'homme d'Henderson la suivit. L'homme tatoué prit l'enveloppe et la mit dans la poche intérieure de son manteau. Henderson prit la relève. "Jeff Saracini, vous êtes en état d'arrestation." Comme il commençait à lui lire ses droits, son compagnon s'enfuit. Clark avait observé toute cela très attentivement. Au premier signe de fuite, lui et les deux officiers en civil se mirent en action, poursuivant l'homme dans la foule vers l'escalier roulant. Clark avait une longueur d'avance sur eux et arriva sur lui en premier. L'attrapant par l'épaule, il força l'homme à s'arrêter. L'homme tenta de le frapper, mais Clark se pencha et son opposant perdit l'équilibre dans son élan et n'atteignit pas sa cible. D'une main de fer, Clark saisit les épaules de son adversaire. "C'est fini. Votre vol est annulé." "Hé, doucement. Vous ne connaissez pas votre force." "Merci, Kent. On le tient." L'officier en civil prit la relève et Clark poussa un profond soupir. Il en voulait davantage. Il voulait secouer ces types, pour leur apprendre ce que c'était de se faire frapper par une personne plus forte que soi. Il était choqué de l'ampleur de son émotion et il resta ainsi sans bouger, ne sachant que faire, luttant pour se contrôler. Il était conscient que ses poings se fermaient et s'ouvraient en regardant, sans l'entendre, le policier lire les droits à l'homme qu'ils venaient d'arrêter. Beaucoup plus tard et plus calme, Clark retourna à l'hôpital, avec un petit bouquet de roses qu'il avait ajouté aux fleurs que Perry et Jimmy avaient déjà apportées. Le médecin avait dit que Lois ne semblait pas avoir de problèmes, mais qu'il préférait qu'elle reste en observation pour la nuit. Quand Clark arriva, Lois luttait contre le sommeil. Son visage était encore enflé, mais il avait changé de couleur, et était maintenant d'un subtil mélange de bleu-gris et de vert. Clark se dit qu'il y avait peut-être aussi un peu de violet. Puis, il remarqua que la pièce était presque pleine. Toute la bande était là, y compris Laura. Lois était au téléphone avec sa mère en Floride. "Oui, je faisais attention. Non, je n'ai pas dit à Clark que j'y allais." Elle écouta un moment en silence. "Non, Maman, je vais bien, bien." Encore le silence, puis elle dit : "Non, tu n'as pas besoin d'écourter tes vacances." Lois tendit le téléphone à Clark : "Dis-lui que je vais bien, Clark." Clark leva les sourcils et la regarda avec un curieux mélange de sourire et de grimace. "Vous avez raison, Ellen, elle prend trop de risques." Il sourit en l'écoutant. "Je sais, elle ne pense jamais aux conséquences." Un autre silence : "Oui, elle agit sans réfléchir." Il écoutait attentivement, gardant les yeux rivés sur sa femme, tout en répondant à Ellen. "Oui, elle agit sous le coup de l'impulsion." "Clark ! Dis-lui que je vais bien." "Oui. Je vais lui dire, Ellen. Profitez de vos vacances. Au revoir." Il raccrocha le combiné et se pencha pour embrasser sa femme sur la joue, croisant ses yeux fulminants. "Cette couleur violette te va à ravir." "Merci, Clark." Son ton était sarcastique. Clark lui sourit et se tourna pour prendre Laura des bras de Martha. "Merci, Maman." Martha et Lois demandèrent presque simultanément : "Alors, que s'est-il passé à l'aéroport ?" "Henderson a attrapé les deux types et leur associée. Je suis allé avec eux au poste de police et j'ai attendu qu'ils cherchent les antécédents de la femme. Elle n'en a aucun, mais devinez quoi ? Elle travaille pour la Métropolis Fidelity, une firme qui a des contrats avec les grand promoteurs, y compris la Compagnie Bronson." Clark se tourna vers Jimmy. "Donc, Jim, demain, on commencera à faire des recherches sur la Métropolis Fidelity et on trouvera qui est derrière et qui en a le contrôle." "Hé, et moi alors ?" demanda Lois. "Vous, ma chérie, vous restez à la maison pour le reste de la semaine." La voix de Perry était ferme. "Allez, Jimmy, on rentre." "Nous aussi, Jonathan. Clark, on emmène Laura. Lois l'a allaitée avant l'arrivée de tout le monde et il y a des biberons dans le frigo." Martha prit sa petite-fille des bras de Clark, se tournant vers Lois pour lui adresser un sourire rassurant. "Lois, ne vous inquiétez pas pour Laura; tout ira bien. A plus tard." Martha se dirigea vers la porte et s'arrêta un instant. "Merci à vous deux, pour tout ce que vous avez fait pour Cliff." Ses yeux se brouillèrent et elle prit affectueusement Clark dans ses bras. "Pas de problèmes, Maman. Tu sais que tu es plutôt incroyable ?" Il avait la voix cassée et il laissa son père prendre la suite. "Allons-y, Martha. Il se fait tard." Lois soupira et se cala sur son oreiller quand il furent tous partis. "Tu crois que tout va bien se passer avec Laura ? Je devrais rentrer moi aussi à la maison. Et si elle est contrariée ? Et si elle... " "Tout va bien se passer, chérie." la coupa-t-il en souriant. "Rappelle-toi, sans remercier la technologie moderne, il y a du lait pour elle et j'ai entendu dire que son père était super." Son expression se fit sérieuse tandis qu'il passait délicatement la main dans ses cheveux. "Lois," commença-t-il. Les yeux de Lois croisèrent les siens et elle lui caressa la main en guise de réponse en voyant ses yeux inquiets. "Je sais, Clark. Je sais. Ne crois pas que je ne pensais pas à tout ça quand j'ai essayé de revenir au refuge." "Tu n'as rien à prouver, Lois. Tu n'as pas besoin de tout faire. Superman lui-même ne peut pas tout faire." "Comment as-tu su, Clark ? Que je ressentais cela, je veux dire." Il lui caressa la joue. "Parce que je t'aime. Et parce que parfois, cela m'arrive à moi aussi et quand ça m'arrive, tu me dis toujours que ce que je fais est suffisant." Elle embrassa la paume de sa main et laissa ses épaules se détendre. Puis, elle sourit. "Mais tu dois admettre que c'est une manière plutôt habile d'avoir deux jours supplémentaires de congé. Et mon côté tranchant, Clark. Je l'ai toujours !" Ses yeux scintillèrent. Une semaine plus tard, la vie des Kent était revenue à la normale. La télévision était allumée, branchée, comme toujours, sur la chaîne des informations. Un élément attira l'attention des quatre membres de la famille Kent. Ils regardèrent la télévision avec étonnement quand la caméra montra le quartier général de la Métropolis Fidelity qui avait été tagué aux premières heures du matin. De vertes vignes grimpantes, des arbres feuillus et des fleurs rougeâtres et fantasques couvraient le béton gris. Étrangement, un grand dessin d'œuf brisé avait été peint près de la porte d'entrée. C'était très beau. Le porte-parole de la Fidelity était en colère et parlait ouvertement de vandalisme et de violation de la propriété privée. Martha se mit à rire. "Eh bien, il y a plus d'une façon d'obtenir un parc." Quand le reportage tira à sa fin, Jonathan donna à Lois une grande enveloppe. "Oh, tenez, j'allais l'oublier. C'était sur les marches du perron quand nous sommes arrivés ce matin." Lois ouvrit l'enveloppe et regarda la seule feuille de papier qu'elle venait de sortir puis elle sourit et la montra à Clark. C'était un croquis réalisé au fusain, représentant Lois et Clark avec humour et affection, à la façon dont ils se regardaient. Au bas de la feuille était écrit : "Merci ". Le bas du croquis était signé des initiales CGM. FIN
Les personnages de cet épisode sont la propriété de DC Comics, December 3rd Production et Warner Brothers. Aucun non respect des droits n'est délibéré de la part de l'auteur ou du Season 6 group, toutefois, les idées exprimées dans cet épisode sont la propriété des auteurs © 1998. |